22 Mars 2020

EUN SYIELLE D'HISTOUÈRE D'CALVADOS   

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CAEN

Canton de Caen

Les habitants de la commune de Caen sont des Caennais, Caennaises.

Janvier 1881  -  Les prières publiques.  -  Dimanche les prières publiques ordonnées par la constitution à l'occasion de la rentrée des chambres ont eu lieu dans toutes les communes du Calvados, sauf dans deux ou trois que nous pourrions citer, où les curés, par pure insouciance, et non par esprit politique, ont oublié de les annoncer. 

A Caen, elles ont été dites au temple protestant où M. le préfet s'est rendu escorté d'un piquet d'honneur, et à St-Etienne, où la préfecture était représentée par M. Farjas, secrétaire général, qui n'en paraissait pas plus heureux, pour cela. 

 

Janvier 1881  -  La neige.  -  Cette semaine la neige est tombée en grande abondance sur notre région. Mardi matin il y en avait plus de 25 centimètres dans les rues de Caen. Tous les trains ont éprouvé des retards considérables. A Rouen, c'était une véritable tempête. La circulation de plusieurs trains de la ligne de Paris et de la mer, a été interrompue. Il y avait plus de 60 centimètres de neige sur les rails. Le dégel avait commencé mardi, mais dans la nuit de mercredi à jeudi, une nouvelle tempête de neige s'est abattue sur notre région. Nous rappelons à nos lecteurs que c'est aux riverains d'enlever ou faire enlever la neige et casser la glace des trottoirs.  

 

Janvier 1881  -  De l’eau, s.v.p..  -  Qu'il fasse chaud ou qu'il gèle, les bornes-fontaines du quartier Saint-Gilles ne donnent pas d'eau. On en a recherché la cause, et une bonne âme a fini par découvrir que c'est pour forcer les religieuses qui dirigent l'école libre de la rue Leroy à s'expulser, que l'administration municipale les prend par la soif. Ce procédé a un double inconvénient : c'est d'abord de ne pas être aimable pour les religieuses, et ensuite d'empêcher beaucoup de personnes de prendre des concessions d'eau qui ne leur seraient pas servies.

 

Janvier 1881  -  Le mauvais temps.  -  Il a gelé, il a neigé, certaines communes ont été bloquées, sur bien des points la circulation a été interrompue. A Caen, on se plaint de la façon lente et inintelligente dont se fait l'enlèvement de la glace et des neiges. Hier encore, au carrefour St-Pierre, c'était, un véritable casse-cou. Il nous semble cependant que par ce temps de chômage il serait facile d'enrôler des escouades d'ouvriers sans travail et de leur faire enlever les glaces et neiges dans les principales rues. Heureusement que ce que ne font pas les  agents de l'administration, le dégel est en train de le faire,

 

Janvier 1881  -  L’eau, la neige, le froid.  -  La fonte des neiges a amené à la fin de la semaine dernière une nouvelle crue des cours d'eau de notre région. C'est la troisième fois que ce fléau atteint nos populations depuis quelques mois, et leur fait éprouver de sérieux désastres. Sur beaucoup de points cette dernière inondation a eu plus d'intensité que les précédentes.

A Caen, pendant la journée de samedi, la crue a atteint une hauteur inquiétante. Les contre-allées du Petit-Cours étaient couvertes et la passerelle du Grand-Cours n'était plus accessible. Ce dernier était submergé par les eaux de l'Orne et de la prairie. Les rues de Vaucelles, Singer et du Havre étaient inondées. Les habitants ont été obligés de construire des ponts volants pour entrer et sortir de chez eux. Le bateau du Havre, quoique ayant porté sa vapeur à toute pression, n'a pu s'amarrer à son débarcadère habituel et a été forcé de s'embosser en dedans du Rond-Point. Le cours Caffarelli, les quais et les prairies riveraines étaient sous l'eau, et les portes de flot qui séparent le bassin de la rivière ont été pour la première fois submergées. 

Le chemin reliant le pont d'Hérouville au bac, sur l'Orne, était couvert de 50 centimètres d'eau.

 

Février 1881  -  Respect aux morts.  -  Nous avons à diverses reprises signalé à l'administration des faits regrettables qui se sont produits aux inhumations par suite d'incurie. Dernièrement encore, à Caen, une fosse se trouvant trop étroite, il a fallu, avant de descendre la bière, attendre que le fossoyeur ait élargi le trou, et encore n'a-t-on pas pu descendre le cercueil jusqu'au fond.

 

Février 1881  -  Un service en vaut un autre.  -  Ces jours-ci, on a lu, devant le Tribunal civil de Caen. une lettre d'un curé de notre ville, destinée à être produite à l'audience et à peser dans la balance de la Justice. A cette lettre il y avait un post-scriptum à peu près ainsi conçu : « Monsieur, je profite de l'occasion, pour vous dire que je fais des embellissements à mon église, et que je serais heureux de vous y voir contribuer ». Voilà qui s'appelle saisir toutes les occasions par les cheveux.

 

Mars 1881  -  Une institutrice qui aime rire.  -   Parmi les punitions que le nouveau règlement des écoles interdit, est assurément la suivante, que l'institutrice d'une commune de l'arrondissement de Caen inflige, dit-on, à ses élèves. Elle les force de lécher le pavé de la classe, et, pour qu'il n'y ait pas tricherie, elle se fait montrer leur langue. On prétend même  qu'elle aurait dit un jour, « Avec deux ou trois petites filles méchantes, je n'ai, pas besoin de laver ma classe !.., »

 

Avril 1881  -  L’administration dans l’embarras.  -  Nous n'avons eu jusqu'ici à signaler de faits de brutalité dans les écoles de Caen, que de la part de congréganistes. La maladie semble gagner les instituteurs laïques. On dit qu'à l'école mutuelle de la rue Guilbert, un sous-maître maltraite les élèves, mais comme c'est un homme habile, qui ne veut pas qu'on puisse lui reprocher de battre les enfants, il leur prend les poignets et les frappé avec leurs mains. Cet incident va mettre l'administration municipale dans un grand embarras. Elle a renvoyé de l'école da la rue de Geôle les congréganistes parce que l'un des leurs frappait les enfants. Elle ne peut dans sa justice faire autrement que de chasser les laïques de la rue Guilbert. Mais par qui les remplacer ? Nous proposons que ce soit par des jeunes filles, au moins, s'il leur prenait fantaisie de cogner les élèves, la main serait plus légère.

 

Avril 1881  -  Des pétitions a prendre en considération.  Nous avons à plusieurs reprises demandé qu'un poste de police soit installé dans la tour Guillaume-Leroi. Les habitants de la rue Montoir-Poissonnerie et de tout le quartier viennent d'adresser au maire une pétition couverte de signatures et réclamant la création de ce poste, devenue urgente par suite des rixes et du tapage qui, se produisent chaque nuit. 

Les habitants du même quartier s'étonnent à bon droit de ne pas avoir de nouvelles de la pétition qu'ils ont signée, au nombre de plus trois cents, pour demander le curage de l'abreuvoir de la Poissonnerie. Voici venir les chaleurs, se décidera-t-on enfin à faire quelque chose pour supprimer les émanations pestilentielles qui s'exhalent de ce cloaque ?

 

Avril 1881  -  Laïques et congréganistes.  -  A la suite de certains faits de brutalité qui leur étaient reprochés, les frères de Tinchebray ayant donné leur démission d'instituteurs de la Maladrerie, les conseils municipaux de Caen et de Saint-Germain-la-Blanche-Herbe ont été consultés, conformément à la loi. Ils ont tous deux demandé que la direction de l'école soit confiée à des instituteurs laïques. 

Le sous-maître laïque de l'école de la rue Guilbert qui a frappé des élèves, va être changé, et le directeur réprimandé.

 

Avril 1881  -  Un adjoint courageux.  -  Dimanche, à Caen, une rixe a eu lieu entre marins sur le port. Un de nos adjoints est intervenu pour les séparer. On ne peut que le féliciter de son courage. Mais, comme nos édiles ne peuvent être partout, ils feraient bien d'installer dans ce quartier un poste de police qui s'entendra mieux qu'eux à empêcher les rixes et les vols.

 

Avril 1881  -  Attention.  -  La population de notre département continue à décroître. D'après le tableau du mouvement de la population en 1879, qui vient d’être publié, il y a eu, dans le Calvados, 8 987 naissances et 10 234 décès. L'excédant des décès sur les naissances a donc été de 1 247. C'est le contraire qui  devrait se produire.

 

Mai 1881  -  Musée d’histoire naturelle.  -  Le musée d’histoire naturelle sera ouvert au public, le lundi 9 mai et le lundi 16 mai, de midi à quatre heures.

 

Mai 1881  -  La petite vérole.  -  Cette maladie sévit à Caen avec assez de force à l'Hôtel-Dieu et dans le quartier de Vaucelles, mais contrairement au bruit répandu dans les environs, elle n'a pas le caractère pernicieux.

 

Mai 1881  -  Les victimes du travail.  -  Samedi, à Caen, le nommé Pierre Barat, 55 ans, demeurant à Villons, ouvrier maçon, occupé à la construction d'une maison, place de la Préfecture, a été victime d'un accident. Une pierre d'un fort volume, qu'il manœuvrait, lui est tombée sur la jambe et la lui a fracturée. Il a été transporté d'urgence à l'Hôtel-Dieu.

 

Mai 1881  -  C’est toujours la même chose.  -  Une affiche du maire de Caen annonce que le curage du Grand-Odon commencera lundi prochain et sera terminé le mardi de la semaine suivante. Ce travail aura donc lieu cette année encore, dans une période de chaleurs, c'est-à- dire au moment où il peut être le plus nuisible à la santé publique. Avant de prendre des arrêtés de ce genre, la préfecture et la mairie devraient bien consulter le conseil d'hygiène.

 

Mai 1881  -  Les processions.  -  On avait fait courir le bruit dans les campagnes que les processions des Rogations n'auraient pas lieu à Caen. Il n’en a rien été et nous félicitons M. Toutain d'avoir laissé subsister ces antiques cérémonies, qui ne font ni bien, ni mal, ni chaud, ni froid. Nous espérons qu'il ne sera pas touché non plus aux processions de la première communion.

 

Juin 1881  -  Bateaux à vapeur.  -  On parle de l'installation prochaine d'une nouvelle ligne de bateaux à vapeur entre Le Havre, Caen, Honfleur, Trouville-Deauville, Dives.

 

Juin 1881  -  Armée territoriale.  -  Le septième tir mensuel pour le 21e régiment territorial d'infanterie aura lieu dimanche prochain au Stand de la route de Creully, de 8 heures à 11  heures du matin, et de midi à 4 heures.

 

Juin 1881  -  Travailleurs militaires.  -  Les travailleurs militaires seront mis cette année à la disposition des cultivateurs à l'époque des récoltes. Comme les années précédentes, ces travailleurs, appartenant à toutes les armes, seront détachés, pendant quinze jours de leur corps où ils devront être rentrés pour le temps des grandes manœuvres. Des permissions de quinze à trente jours seront accordées par les commandants de corps d'armée à un certain nombre de militaires sous leurs ordres, pour prendre part aux travaux agricoles dans leurs familles, lorsque celles-ci rempliront les conditions. Les cultivateurs qui ont été déjà signalés ou qui le seront cette année, comme ayant traité peu convenablement les militaires travaillant chez eux, seront à l'avenir privés de ce concours.

 

Juin 1881  -  La fête-Dieu ; incidents.  -  Dimanche l'après-midi, profitant d'une éclaircie, la plupart des paroisses ont fait les processions de la Fête-Dieu. Cette cérémonie se fût passée paisiblement à Caen, sans M. le curé de Saint-Pierre, auquel il arrive toujours quelque chose de plus extraordinaire qu'à ses confrères. La procession rentrait à l'église par la place Saint-Pierre et obstruait ainsi six grandes voies, c'est-à-dire les boulevards et les rues Saint-Jean, Saint-Pierre, Montoir-Poissonnerie et de Geôle. A ce moment, arrive par cette dernière rue une voiture chargée de bagages se rendant à la gare. Le cocher attend que le dais, et sa suite soient passés. Comme il ne restait plus que la queue de la procession, il veut avancer, plusieurs fidèles se jettent à la tête de ses chevaux, encouragés par la présence de leur curé, qui remplissait, dans cette circonstance, les fonctions de gendarme en surplis, avec d'autant plus de joie, qu'il avait reconnu dans le voyageur M. Melon, pasteur protestant. 

Mais si, pour se venger de cette petite mésaventure, M. Melon allait, comme c'est son droit, exiger l'application de la loi qui est formelle et interdit les processions sur la voie publique dans les villes où il existe des cultes divers, il n'y aurait pas, cette fois, à dire m...., il faudrait que M. le curé de St-Pierre s'y conformât. 

On dit que procès-verbal aurait été dressé contre un voiturier de Grainville-Langannerie pour avoir fouetté ses chevaux au grand trot, en coupant une procession de Caen.

 

Juin 1881  -  La fête-Dieu ; incidents.  -  Il est d'usage tous les ans, dans la semaine qui suit la Fête-Dieu, de conduire les élèves du lycée à la chapelle pour y chanter le Salut. Il paraît que cette année les élèves se sont mis tous la tête dans le même bonnet pour ne pas chanter.

 

Juin 1881  -  Instruction et service militaire.  -  La Chambre des députés vient de repousser le projet de loi qui avait pour but de réduire à 3 ans la durée du service militaire. La loi établissant l'enseignement primaire gratuit dans toutes les écoles publiques vient d'être promulguée et sera mise en vigueur à la rentrée prochaine. 

 

Juin 1881  -  Comptez avant de crier.  -  En ce moment, trente ou quarante communes du département ont à reconstruire leurs maisons d'école. Dans quelques unes, les contribuables murmurent fort contre les conseils municipaux qui ont voté cette reconstruction. Ils oublient que c'est là, une dépense obligatoire. Si le conseil la refuse, le préfet passe outre, impose la commune d'office et celle-ci a à payer la totalité des vingt ou vingt-cinq mille francs que coûte la construction. Si au contraire le conseil vote la dépense, l'État donne un secours, et au lieu de payer vingt mille francs, les contribuables en sont quittes pour sept ou huit mille. Murmurer quand on ne paie que le tiers de la dépense au lieu de tout payer, ce n'est pas faire preuve d'esprit d'à-propos.

 

Juin 1881  -  La comète.  -  Une comète est en ce moment visible. Les superstitieux voient à tort dans l'apparition de cet astre un présage de calamité publique. Les comètes sont un monde en feu, comme l'a été autrefois la terre. La queue de la comète actuelle est de plusieurs millions de lieus. Elle est très éloignée de la terre, et sa marche est vertigineuse.

 

Juillet 1881  -  Une grosse décision.  -  Par arrêté, le maire de Caen vient d'interdire toutes processions autres que celles des Rogations et de la Fête-Dieu. Nous approuverions cet arrêté sans réserves, si la tolérance municipale s'étendait aux processions qui terminent si gracieusement cette fête de l'enfance qu'on appelle la première communion. 

 

Juillet 1881  -  Condamnés à la pépie.  -  Lundi dernier, par une chaleur torride, le quartier St-Gilles, à Caen, a été toute la journée sans eau. Si nos conseillers municipaux avaient passé par là, ils auraient pu entendre les malédictions dont les accablaient les ménagères, ne sachant où aller pour trouver un peu d'eau. Elles criaient très haut contre l'insouciance d'une municipalité qui inflige à ses administrés le supplice de la pépie.

 

Juillet 1881  -  Une cochonnerie.  -  C'est ainsi qu'un honorable charcutier du quartier St-Sauveur de Caen appelle l'envoi d'un paquet de photographies du prince Napoléon, qu'il vient de recevoir. Disons que cet envoi s'est trompé d'adresse. Notre charcutier est républicain, son prédécesseur était bonapartiste, c'est à lui qu'étaient destinées les images du prétendant Pion-Pion. 

 

Juillet 1881  -  Les chaleurs.  -  La chaleur torride que nous avons éprouvée pendant la dernière quinzaine s'est fait ressentir partout et depuis longtemps on n'avait vu été aussi chaud. A Paris, à la revue du 14, il y a eu de nombreux cas d'insolation, une vingtaine sont fort graves. Les arbres des boulevards ont perdu leurs feuilles comme à l'automne, et dans les rues on  enfonçait en marchant sur l'asphalte, amollie par la chaleur. L’eau a failli manquer.

Dans beaucoup de départements, il y a eu des morts subites causées par la chaleur. A Cincinnati, en Amérique, 414 personnes sont mortes de chaleur. Il faut remonter jusqu'en 1793 pour trouver des chaleurs semblables. 

 

Juillet 1881  -  Information salutaire.  -  Dans la cour de la maison n° 82, rue Saint-Pierre, à Caen, au pied même de la nouvelle sacristie de St-Sauveur, existe un cloaque pestilentiel, fosse d'aisances qu'aucun voisin n'a vu curer depuis plus de trente ans. La pierre qui la recouvre n'a pas deux centimètres d'épaisseur, elle est usée, démaçonnée, trouée, et si quelqu'un y posait le pied, la chute serait inévitable, et quelle chute, bon Dieu ! Il y a danger surtout pour les enfants sortant de ce côté de l'église, et si l'un de nos administrateurs, venait à visiter les travaux de la sacristie sans être prévenu, bien sûr qu'il prendrait un bain d'où il ne sortirait pas en odeur de sainteté.

 

Juillet 1881  -  Gare aux accidents.  -  Le conseil municipal de Caen devrait bien s'occuper d'élargir la venelle St-Nicolas. Cette venelle, très fréquentée depuis l'existence de la gare Saint-Martin, est à peine suffisante pour donner passage à deux voitures de front. Les passants à pied n'ont ni trottoirs, ni refuges, où ils puissent se mettre à l'abri. La semaine dernière, un cheval attelé sur une voiture légère s'est emporté en descendant cette venelle, et est venu se précipiter dans la boutique de M. Fiant, plâtrier, rue de Bayeux. Mme Fiant n'a eu que le temps de s'enfuir dans l'intérieur de sa maison.

 

Juillet 1881  -  Instruction primaire.  -  Le cours gratuit, organisé sous le patronage du Cercle caennais de la Ligue de l'enseignement, en faveur des ouvriers adultes, sera fait chaque dimanche, et aura lieu de 1 heure à 4 heures. Les adhérents sont priés de se faire inscrire le dimanche, de 1 heure à trois heures, chez Mr Georges Bellière, représentant de commerce, rue de la Gare, n° 2, Caen. L'ouverture du cours sera fixée.

 

Juillet 1881  -  Bonne mesure.  -   Le ministre de l'instruction publique vient de prendre une mesure depuis longtemps attendue. Par une circulaire, du 30 juillet, il édicte la peine de révocation contre tout professeur ou instituteur qui frapperait un enfant.

 

Octobre 1881  -  Négligence déplorable.  -  Nous avons signalé à diverses reprises à l'administration municipale de Caen, combien le service des fossoyeurs est négligé dans les cimetières. Samedi encore, au cimetière St-Pierre, à l'inhumation du malheureux ouvrier tué à la fonderie Turquetil, la fosse s'est trouvée trop étroite et il y a eu une grande demi-heure de retard, pendant laquelle quelques-uns des assistants ont dû aider à agrandir le trou pour permettre d'y descendre la bière.

 

Novembre 1881  -  L’hiver.  -  D'après de récents avis des diverses, agences météorologique les plus dignes de foi, l'hiver de cette année sera l'un des plus rigoureux du siècle, du commencement de décembre à la mi-février, le froid serait très vif, la neige est déjà apparue dans l’Est de la France. Elle est tombée dimanche à Lisieux.

 

Novembre 1881  -  Instruction primaire.  -   Un décret porte que chaque commune va recevoir une subvention extraordinaire destinée à lui rembourser la somme qu'elle doit prélever sur ses revenus ordinaires pour la gratitude de l'instruction.

 

Novembre 1881  -  Logement de militaires.  -  Les hommes de la classe 1880 seront, à leur arrivée à Caen, logés par les habitants des rues désignées ci-après : du 13 au 14, rues des Carmes, du Havre, Royale, Singer, de la Marine, Frementel, La Place, quai de Juillet, rue Saint-Jean (côté gauche). Du 15 au 16, rue Saint-Jean.  

 

Décembre 1881  -  L’ouragan.  -  Une véritable rafale de vent a sévi ces derniers jours sur toute notre région. Les toitures et les arbres n'ont pas été épargnés, mais on ne signale aucun grave accident de personne. Mardi soir, a Caen, on a entendu un coup de tonnerre. Une porteuse du journaux a été renversée rue des Carmélites par le choc de la foudre. Une violente tempête vient de causer de grands désastres en Algérie. Les chemins de fer ont été coupés en plusieurs endroits par suite d'inondations. Une digue s'est rompue près d'Oran, 160 personnes ont péri.

 

Janvier 1882  -  Population.  -  Les chiffre de la population à Caen est de 41 322, c’est-à-dire 141 habitants, de plus qu'il y a cinq ans. On compte 340 maisons en plus et 562 ménages en moins. 

Dans la nuit du 17 au 18 décembre, on a constaté que 843 personnes habitant ordinairement la ville étaient absentes de leur domicile. On a trouvé à cette date 408 voyageurs dans les hôtels. Dans les casernes de Caen et de Beaulieu, on compte 1 043 militaires, remonte et enfants de troupe, 231.

Prison de Beaulieu, 604 détenus, 60 employés, prison de Caen, 140 détenus, 6 gardiens.Bon-Sauveur : 443 aliénés hommes, 674 femmes, 252 religieuses, 4 chapelains, 180 gardiens et ouvriers. Hospice Saint-Louis : 28 religieuses, 390 domestiques et pensionnaires. Couvent de la Charité : 73 religieuses, 338 pensionnaires. Petites Sœurs des Pauvres : 164 pensionnaires. Sainte-Marie, 160. Hôtel-dieu : 51 religieuses, 75 domestiques, la plupart des malades ont été recensés au domicile de leur famille.  

 

Janvier 1882  -  Marché couvert.  -  Enfin, on s’y décide. Lundi, prochain, ouverture du marché couvert du boulevard St-Pierre à Caen.

 

Janvier 1882  -  Découverte inattendue.  -  Les travaux qu'on fait en ce moment à l'église de Vaucelles, à Caen, viennent d'y faire découvrir des peintures très remarquables, remontant aux XVe et XVIe siècle.

 

Janvier 1882  -  Enlevez-les.  -  Maintenant que le Marché couvert est ouvert, la municipalité de Caen devrait bien faire enlever les baraques du boulevard St-Pierre. Elles encombrent la voie publique et servent de cible aux gamins du voisinage, dont la maladresse occasionne souvent des avaries aux devantures des boutiques, comme cela s'est produit par deux reprises cette semaine.  

 

Mars 1882  -  Un marronnier précoce.  -  Les journaux de Paris annonçaient, ces jours derniers, qu'il y a en ce moment aux Champs-Elysées un marronnier en feuilles. Il en est de même à Caen. Derrière le lycée, vers le milieu de la rue du Carel, on peut apercevoir deux marronniers peu distancés dont les racines s'étendent jusque dans l'Odon, et dont l'un étale au bout de ses branches de nombreuses feuilles vertes et parfaitement développées.

 

Mars 1882  -  Rue nouvelle.  -  On vient de livrer à la circulation, à Caen, une rue mettant en communication la rue Basse, Courtonne et le Canal.

 

Mars 1882  -  Cavalcade.  -  La cavalcade organisée jeudi dernier, à Caen, par quelques jeunes gens dévoués a bien réussi. Les chars étaient fort bien décorés et les costumes on ne peut plus frais. Le soir, un très joli bal a eu lieu dans une des salles de l'Hôtel-de-Ville. Nous ne connaissons pas encore le résultat, mais on parle de 2 à 3 000 fr. pour les pauvres. Cet essai à remis en goût les organisateurs des grandes cavalcades d'autrefois, on parle de profiter du concours régional pour représenter l'Entrée de Guillaume le Conquérant â Caen. Excellente idée.

 

Mars 1882  -  Un bon signe.  -  On signale le passage de nombreuses bandes de canards sauvages qui, depuis quelques jours, s'en retournent vers les régions qu'ils avaient abandonnées au commencement de l'hiver. On sait que ce passage indique généralement la fin du froid. 

 

Avril 1882  -  Négligence et inconvenance .  -   La semaine dernière, au cimetière de Vaucelles, un cercueil, venu du Bon-Sauveur, a été déposé dans la fosse à huit heures du matin. A plus de midi et demi, la tombe était encore ouverte, et le cercueil restait exposé à tous les regards. Espérons qu'on veillera à ce que pareil fait ne se reproduise plus. 

 

Avril 1882  -  Inspection .  -   On va commencer une inspection dans les villes ouvrières de province, pour surveiller l'application de la loi du 15 mai 1875, interdisant d'employer les enfants au-dessous de seize ans, dans les ateliers qui mettent en mouvement des machines.

 

Avril 1882  -  Comme tout dégénère !  -   Le vendredi saint, sur le marché de Caen, deux marchandes de bonnets se sont prises aux cheveux, à propos d'un chien dont elles se disputaient la propriété. Autrefois, c'était pour les hommes que les femmes se peignaient, maintenant c'est pour un caniche. Comme tout dégénère !

 

Avril 1882  -  Un nouveau St-Antoine .  -   Comme si ce n'était pas assez de voir nos rues encombrées par les chiens errants, un négociant de la rue Singer, laisse journellement ses cochons flâner sur la voie publique. Il fera bien de les rentrer, s'il ne veut pas que ses voisins le baptisent du nom de Saint-Antoine.

 

Avril 1882  -  Armée.  -  En ce moment, dans certaines garnisons de notre région, on tire au sort 75 hommes par bataillon, qui sont dirigés sur l'Afrique.

 

Mai 1882  -  Négligence inqualifiable.  -  Lundi un fait regrettable s'est produit à l'église St-Etienne, à Caen. On inhumait une demoiselle de la rue de Bayeux. Le cercueil avait été fait avec si peu de soin qu'il laissait échapper les liquides cadavériques. Les assistants étaient indignés.

 

Mai 1882  -  Le saumon.  -  Le saumon est fort abondant en ce moment dans l'Orne. Lundi il y en avait 31 à la Poissonnerie de Caen. Ils se sont vendus entre 3 et 4 fr. le kilog. 

 

Juin 1882  -  La chaleur.  -  La température insolite  qui règne depuis  quelques semaines, est cause d'une aggravation de la mortalité dans certaines contrées. A Paris, le chiffre des décès a été de plus de 1000 dans la dernière semaine, total considérable en raison du nombre actuel des  habitants. 

 

Juin 1882  -  Bonne mesure.  -  Le maire de Caen faisant droit à une réclamation que nous faisons chaque année, vient de prescrire que toute voiture de foin, avant d'être exposée en  vente sur le marché de Caen, devra préalablement avoir été pesée au poids public.

 

Juin 1882  -  Bon exemple.  -  Beaucoup de communes du Calvados ont créé des caisses des écoles pour subvenir à l'entretien des élèves indigents, en leur fournissant des soupes l'hiver, ainsi que des fournitures de classes et au besoin des habits. Dans certaines, des souscriptions ont été faites spontanément par les conseillers municipaux, afin de ne pas trop grever le budget communal. 

Il serait d'un bon exemple pour les autres communes qui ne l'ont pas fait, que le Préfet communiquât aux journaux celles où ces souscriptions ont eu lieu.

 

Juin 1882  -  Cours d’eau  à détourner.  -  Pendant que l'administration municipale de Caen est en train de s'occuper d'urinoirs, nous lui signalons la cour de l'église Saint-Sauveur. Les jours de grande fête notamment, il s'y forme des mares qui ne sentent pas l'eau... bénite.

 

Juillet 1882  -  Un lavoir qui n’est plus public.  -  On nous prie d'appeler l'attention de qui de droit sur l'état de délabrement du lavoir de la rue des Capucins, à Caen. C'est à peine si on peut y laver, et en outre, certaines voisines l'accaparent à leur profit, de sorte que la majeure partie de la population de ce quartier ne peut plus s'en servir, les places y étant gardées quand elles ne sont pas occupées.

 

Juillet 1882  -  Exécution capitale à Caen  -  Tous les Caennais connaissent  les  quatre larges pavés placés au milieu des promenades Saint-Julien, qui servait de point d’appui aux montants de l’ancien échafaud. La guillotine Heindreich se transporte  par chemin de fer dans une voiture hermétiquement  fermée, dans laquelle sont placés les deux bras, la bascule, le panier, le couperet et la provision de son. A son arrivée en gare, un cheval et un conducteur du pays sont requis de la conduire au lieu d’exécution. Vendredi, pendant la nuit, cette machine a été montée à Caen en une heure et demie.

Le bourreau et ses aides.  -  M. Roch, n'est pas un débutant ; dès l'âge de 18 ans, il était premier aide à Amiens ; et depuis qu'il est exécuteur,  il a rempli une quinzaine de fois son terrible  ministère. Il répond sans emphase aux questions qu'on lui pose ; et quand nous lui demandons ce qu'on fait de la tête une fois coupée...

C'est bien simple, nous répond-il ; on la prend par les cheveux et on la flanque dans le panier.

Dans la prison.  -  Mancel, âgé de 49 ans, tailleur de pierres à Louvigny, condamné à mort par arrêt de la Cour d'assises, pour assassinat sur la personne de sa fille, âgée de 17 ans, avait le ferme espoir qu'on lui ferait grâce de la vie ; ceux qui l'approchaient le lui laissaient entendre.  Aussi, quand vers 1 heure et de mie  du matin, on  est venu le réveiller pour lui annoncer que l'heure de l'expiation allait sonner, est-il resté atterré .... Pâle, livide, couvert d'une sueur glacée,  il s'est levé en trébuchant et en prononçant des paroles sans suite, protestant de son innocence et de son honnêteté ; mais bientôt il a repris cette ferme assurance qui ne devait plus le quitter. Sur les instances de  M. l'abbé Lemoine, le condamné s'est confessé ; ensuite, il  a entendu la messe dans la chapelle de la prison, mais sans y recevoir la communion.

Quand Mancel a été livré à l'exécuteur, il s'est enquis s'il y avait beaucoup de monde sur les fossés Saint-Julien ; puis on lui a mis une corde lâche aux pieds, et on lui a lié les mains derrière le dos ; à cette  dernière opération, le condamné a fait quelque résistance, disant : " Mais vous me faites mal ;  pourquoi me lier si fort ; on dirait une bête qu'on conduit à l'abattoir !..."

  Quelques instants après, Mancel embrassait l'exécuteur et les gardiens, vis-à-vis desquels il avait été, tout le temps de sa détention,  exigeant, brutal, arrogant; les portes de la prison s'ouvraient, et le patient, accompagné de M. Lemoine, montait dans la sombre voiture, la même qui avait apporté de Paris l'instrument de supplice; quatre gendarmes  prenaient place à leurs cotés. L'exécuteur, après avoir demandé au gardien deux chaises pour asseoir l'aumônier et le condamné, s'est placé sur le  siège, et le cortège, escorté de gendarmes à cheval et de chasseurs à pied, suivi d'une foule énorme, s'est dirigé vers les fossés St-Julien, en passant par les rues Guillaume et Saint-Manvieu.  

L'exécution !  -  A quatre heures moins deux minutes, la voiture prend place le long de l'échafaud, le battant de derrière s'abaisse et laisse voir l'escalier garni d'une rampe qui est adapté. Le condamné, la poitrine nue, soutenu par son confesseur, en descend les degrés. Mancel est  de taille assez élevée. Il est gros et  boite  légèrement. Sa pâleur est effrayante....  Il lève la tête, et voit en l'air la lame triangulaire ....  Ses yeux, pendant une seconde, paraissent hagards ; puis il fait  un brusque mouvement en arrière et s'écrie : " Vengeance ! justice ! ... Il n'y.... " Il ne peut achever .... Une main lui ferme la bouche....

Une dernière fois, M. l'abbé Lemoine presse Mancel dans ses bras et lui fait baiser le crucifix...  Les exécuteurs s'en emparent, et le poussent vers la bascule. La planche s'abaisse ; l'exécuteur pose la main sur le dos du condamné, qui n'a pas le temps de faire un mouvement. La lame descend en sifflant, et le corps  roule dans le panier au moment où le sang afflue à la section du cou. On entend plusieurs chocs : ce sont les soubresauts de la tête contre les parois de tôle.  On la met dans le panier, qu'on hisse ensuite dans la noire voiture, toujours la même, qui attend toute attelée. L'exécuteur monte sur le siège, et conduit  au cimetière des Quatre-Nations cette tête et ce corps qui furent un être humain.  

Après !  -  Arrivée au cimetière, la voiture est entrée et les portes se sont refermées; le panier a été descendu ; l'exécuteur a coupé la corde qui retenait les mains du supplicié, et a ordonné au sieur X..., menuisier à Caen, qui s'était chargé de la confection du cercueil, d'y déposer le corps de Mancel  et de placer la tête entre les jambes. Cette triste besogne accomplie, le cercueil a été transporté dans le coin maudit réservé aux guillotinés, et le fourgon a repris le chemin des promenades Saint-Julien.

Pendant l'absence de leur chef, les trois aides avaient démonté la machine, nettoyé toutes les  pièces, et lavé le sol maculé de sang. Une demi-heure après il ne restait plus sur les fossés Saint-Julien qu'une trace humide, attestant que le glaive de la justice des hommes avait fonctionné là.

On peut évaluer à 3000 le nombre des curieux accourus pour assister à l'exécution de  Mancel et constater la supériorité de la nouvelle machine sur l'ancienne. De cette foule qui n'a  manifesté pour le patient aucune sympathie, je ne dirai rien ; son attitude a été digne ; la police et la troupe l'ont contenue sans effort.  Comme toujours, les femmes  étaient en grand nombre sur la place de l'exécution ; quelques-unes portaient sur leurs bras des enfants trop petit pour marcher, ou pour être abandonnés à la maison.  Chacun, a dû se demander à  quelle classe pouvaient appartenir ces créatures hideuses qui se cramponnaient aux arbres ou sur le dos du premier venu, pour mieux voir rouler dans le noir panier le corps du décapité. 

Sur les registres de l'état-civil de Caen est inscrit à la date du 6 juillet 1882 : Emmanuel-Charles Mancel, âgé de 49 ans, décédé à Caen, promenades Saint-Julien. 

 

Août 1882  -  Question.  -  Il est question de débaptiser la place Royale, qu'on appellerait place de la République ou de l'Hôtel-de-Ville, d'en faire un square, et de déplacer la statue de Louis XIV, qu'on remplacerait par une estrade de musique.

 

Août 1882  -  Les bêtises municipales.  -  Le Conseil municipal de Caen a décidé qu'on descendrait Louis XIV de son piédestal. Ce n'est pas pour le mettre à pisser, comme beaucoup de personnes pourraient le croire, mais pour le transporter place du Lycée. Nous n’avons pas l'honneur d'appartenir à sa famille, mais déranger ainsi ce bonhomme qui ne fait de mal à personne, c'est tout simplement idiot.

 

Août 1882  -  Information.  -  Désormais, la place Royale de Caen s'appellera : place de la  République. Elle sera transformée en square, et à la place de Louis XIV on établira un Kiosque monumental pour la Musique. Pendant qu'elle y est, pourquoi la Ville ne complète-t-elle pas la chose en agrandissant de deux mètres la place, et en remplaçant la bordure de pierres par une grille au pied de laquelle on planterait une bordure de fleurs.

 

Septembre 1882  -  Il est enlevé.  -  Louis XIV a donné de la corde à retordre à M. Mériel. Commencé lundi matin, l'enlèvement de la statue de l'ex-place Royale n'a été terminé que mercredi à neuf heures. Une heure après, un camion Blochon transportait le pauvre roi dans la cour du Palais de Justice, sa demeure provisoire. Pour réunir la charpente nécessaire on à dû frapper à trois maisons, deux n'ayant rien voulu prêter pour cette singulière besogne. 

De nombreux curieux n'ont cessé de stationner sur la place. La majorité est contraire à ce changement. Des gens qui, comme nous, sont loin d'être légitimistes, faisaient justement remarquer que ce que MM. Roulland et Toutain, républicains de la veille, avaient toléré, l'ex-bonapartiste Mériel pouvait bien le souffrir. 

Un seul incident : mardi soir, un perruquier du quartier de la Poissonnerie essayait d'expliquer, place Royale, ce qu'était l'Édit de Nantes, dont on a tant parié à propos de Louis XIV. La foule, au lieu d'écouter, a ri, les gamins se sont mis à chanter sur l'air des lampions : C'est pas vrai !... Et il a fallu l’intervention de la police pour protéger la retraite de cet orateur improvisé.

 

Septembre 1882  -  Musique.  -  La ville de Caen a décidé l'organisation d'un conservatoire Municipal, avec un directeur-chef, faisant un cours d'Harmonie, aux appointements de 2 500 francs. Il parait que M. Cariez est désigné pour ce poste important. Il était impossible, sous tous les rapports, de faire un meilleur choix.

 

Septembre 1882  -  Pêche singulière.  -  La semaine dernière, un cocher passant au haut de la rue Saint-Jean, à Caen, faisait claquer son fouet. Il sent de la résistance, tire... Savez-vous ce qu'il amène ? la lanterne d'un candélabre... Cet accident prouve peu en faveur de la solidité de nos candélabres municipaux, que l'on fait cependant payer assez cher à ceux qui les renversent.  

 

Octobre 1882  -  Apprentis et petits domestiques.  -  Dans notre dernier numéro, nous avons annoncé qu'un certain nombre d'enfants assistés, filles et garçons, ayant, atteint l'âge de treize ans, et sachant lire et écrire, sont à la disposition des personnes qui voudraient les prendre, comme petits domestiques ou apprentis. Il faut s'adresser à la préfecture, service des enfants assistés. Ajoutons que durant l'année dernière, aucune poursuite judiciaire n'a été dirigée contre les 443 enfants assistés, âgés de 14 à 20 ans, placés dans le Calvados. Au 18juillet, 333 de ces enfants avaient déposé 20 040 fr. à la caisse d'épargne.

 

Octobre 1882  -  Question.  -  Dimanche, au sortie de la messe, les banneliers étaient encore en train d'enlever les ordures dans la rue Froide. Comme excuse, ils ont dit qu'ils avaient été à la messe de 8 heures.

 

Octobre 1882  -  L'incendie de la Minoterie.  -  Au commencement de juillet dernier, on inaugurait, à Caen, près du nouveau bassin, la minoterie Anger et Solenge. Elle marcha un mois sans être assurée. La semaine dernière, le travail fut interrompu pendant deux ou trois jours, pour nettoyer, graisser et resserrer les courroies. Jeudi, à dix heures, on la mettait en mouvement à deux heures et demie, le feu se déclarait au quatrième étage. Quelques heures après, il ne restait plus que les murs. 

C'est la pompe des Chantiers du Nord qui à la première fonctionné, puis celles du génie, de la gare et de la rue Saint-Jean. On n'a pu avoir celle de Vaucelles, le pompier qui est dépositaire de la clef de la remise était absent. Ces pompes ne suffisant pas, un camion des Chantiers du Nord est venu en chercher trois au dépôt central. Si les réservoirs, dont l'eau avait servi à remplir la chaudière, avaient été pleine, et si on eût pu, au début, utiliser le puits artésien de la minoterie, le sinistre pouvait être conjuré. Mais il a fallu se contenter de sauver les chantiers de bois qui se trouvent près des bâtiments incendiés. 

Les premiers secours ont été portés par les ouvriers et employés de l'usine et des Chantiers du Nord, par les déchargeurs du quai, puis sont arrivés les pompiers, la troupe et les autorités.

Malheureusement le commandement a manqué, tout le monde a perdu la tête, c'étaient des allées et venues, des cris, des contre-ordres. Tout le monde s'en mêlait, jusqu'aux adjoints, dont un s'est fait vertement rembarrer par un sergent de pompiers. Une pompe, placée dans le puits artésien des Chantiers du Nord, a été enlevée sur l'ordre d'un sergent de pompiers, puis replacée ensuite sur l'ordre d'un autre. M Girard, propriétaire de l'Anneau-d’Or, a été légèrement blessé. Le capitaine Lubineau était absent de Caen. 

On suppose que le feu a pris par le frottement d'une poulie, et que ce petit foyer, alimenté par les ventilateurs, s'est rapidement propagé. Le tout était assuré pour 444 600 francs, partagés par tiers entre les compagnies La Nationale, Le Phénix et L'Union. Les pertes sont de 322 000 fr., elles se décomposent ainsi : bâtiments, 135 000 fr. ; matériel, 100 000 fr. ; machines, 30 000 fr. ; marchandises, 60 000 fr., assurées pour 50 000 fr., on a pu en sauver pour 3 000 fr. De plus, les compagnies auront à supporter les frais d'hommes et de déblaiement, en deux jours, ils ont eu à payer 15 à 1 600 francs. Le déblaiement dépassera 3 000 francs. La minoterie avait des marchés importants, sur lesquels elle espérait pouvoir réaliser de 40 à 50 000 francs de bénéfices. 

Tout le monde a pu constater que notre matériel d'incendie est défectueux et insuffisant. On dit même, qu'à ce sujet, le maire aurait reçu, d'un officier supérieur, un compliment peu flatteur. C'est une leçon ! Que l'administration en fasse son profit, qu'elle sacrifie un peu moins à ses fantaisies politiques, et se préoccupe davantage d'un matériel duquel dépend la sécurité de la cité.

Avis. — Les cultivateurs et maraîchers sont invités à se présenter avec des attelages à la Minoterie Anger et Solenge, à Caen, pour y prendre gratuitement des déblais en blés, farines et sons, provenant de l'incendie de l'usine et qui constituent un très bon engrais.

 

Octobre 1882  -  Statistique.  -  La statistique vient de découvrir que la Calvados est un des départements dans lesquels il y a le plus de vieilles filles, et où les vieillards se trouvent en plus grand nombre.

 

Octobre 1882  -  Une histoire de fleurs.  -  Lorsque Louis XIV fut posé sur la place-Royale, il portait sur sa ceinture des fleurs de lys, que la municipalité de 1830 fit gratter. 

Dernièrement, les anciens amis politiques de M. Mériel vinrent le trouver, et lui demandèrent le rétablissement de ces fleurs. Il fut sensible à cette démarche, paraît-il, car les fleurs étaient déjà fondues, lorsqu'un membre de l'administration s'en vint démontrer à M. Mériel que, dans cette circonstance, il avait eu tort de prendre une demande légitimiste, pour une réclamation légitime. L'affaire en est là.

 

Octobre 1882  -  Et nos chemins ?   -  Dans les plus petites communes, on entretient avec soin les chemins vicinaux et ruraux. A Caen, il en est autrement. La plupart sont dans un piteux état, notamment celui qui va du Gaillon à la route de la Délivrande et au Moulin-au-Roi. Nous n'engageons personne à y aller voir car si on y entre, on n'est pas certain d'en sortir. 

 

Décembre 1882  -  Laïcisation. -  Le conseil municipal de Caen s'est réuni extraordinairement pour émettre un vœu favorable à la laïcisation de l'école maternelle du Vaugueux. La directrice actuelle a quitté l'habit religieux pour rester à la tête de l'école. C'est, nous assure-t-on, la huitième religieuse de la même communauté qui jette le voile aux orties. 

 

Mars 1883  -  Place Royale. –  On abat de chaque côte de la place un arbre sur deux. Au milieu de la place sera établi un kiosque-cage à musique de 12 mètres, une promenade de 14 mètres de large sera ménagée autour, puis viendront les massifs, avec une grotte au fond. Quant à la grille, elle n'aura rien de monumental, et ressemblera assez aux grilles qui entourent dans les cimetières les concessions à perpétuité. 

En 1830, le conseil municipal a eu l'intention de faire abattre les arbres du Grand-Cours, la population s'y est opposée, et ces cathédrales de la nature, comme on les appelait, sont restées debout. En 1848, un citoyen proposa aussi de fondre Louis XIV, et d'en faire des gros sous pour être distribués au peuple comme réjouissance. 

 

Mai 1883  -  Question indiscrète. – Les urinoirs dorés et bronzés pour hommes installés à Caen sont magnifiques. Est-ce que l'administration ne finira pas par en créer un ou deux pour dames ? 

On demande aussi ce que l'administration attend pour faire enlever les anciens, notamment celui de la place des Petites-Boucheries.

 

Mai 1883  -  Cavalcade. –  Au mois de juillet de l’année dernière, trois honorables commerçants de notre ville, vinrent nous consulter au sujet de l'organisation d'une grande cavalcade historique. Nous  les encourageâmes à poursuivre leur idée. Puis ils se rendirent chez M. Desruisseaux pour lui demander de rédiger un précis historique de cette cavalcade. Comme on le voit, le projet d'organisation de cette fête de charité n'avait aucun caractère politique. 

Il y a cinq mois, une commission d'organisation était nommée dans une réunion publique. Cette commission se mettait immédiatement à l’œuvre, elle organisait des quêtes, elle s'assurait le concours de l'armée et obtenait, par l'intermédiaire de M. Edmond Henry, l'autorisation de faire une loterie. Plus tard, la commission d'organisation priait la presse de se joindre à elle, tous nos confrères, sans distinction d'opinion, s’empressèrent de répondre à cet appel. Aussitôt, des sous-commissions, chargées de la loterie, des chars, des costumes et de la partie hippique, furent nommées. Puis, la commission d'organisation approuva la création d'un comité-directeur composé de MM. Adelus, Alliot, Ballière, Bâtard, de Civille, Daubian, Knell, Legoux, Poisson, Renard et Verel. Le comité informé que l'administration municipale, contrairement aux précédents, contrairement aux intentions de la commission d'organisation et dû .comité directeur, avait la prétention de centraliser dans la caisse du bureau de bienfaisance, les fonds provenant de la loterie et des quêtes, une correspondance s'engagea à ce sujet. 

Précédents : Cavalcade de 1863, sur 10 300 fr. restant pour les pauvres, le bureau de bienfaisance de Caen a eu 2 050fr    Cavalcade, de l868, sur 12 630 fr., on a donné 3 000 au bureau de bienfaisance.    Cavalcade de 1869, on a donné au bureau de bienfaisance,  500 fr.    Nous ne parlons pas de celle de 1875, dont le résultat a été mauvais. Le comité directeur de la Cavalcade offrait au bureau de bienfaisance et à ses oeuvres, 13 000 fr. sur les 26 000 qu'on espérait réaliser pour les pauvres.

La nouvelle cavalcade, fixée au 8 juillet, représentera L'Entrée de Guillaume-le-Conquérant à Caen, nous préférions le sujet : Caen à travers les ages. Quoi qu'il en soit nous faisons les vœux sincères pour  la complète réussite.  

 

Mai 1883  -  Monument Gambetta. –  Le conseil municipal de Caen à, sur la proposition de M. Foucher, voté a l'unanimité, une somme de 200 francs pour la souscription nationale au monument qui doit être élevé à Paris à Gambetta. Nous, pensons que l'argent des contribuables pourrait être mieux employé.

 

Juin 1883  -  Étourderies d’architectes. –  Est-ce vrai que la direction des postes ne peut pas prendre possession de l'hôtel construit rue de l'Hôtel-de-Ville : parce que les fenêtres ne peuvent s'ouvrir ; 2° parce qu'un des escaliers est si étroit que le receveur actuel ne peut y passer de face ; 3° parce qu'un immense couloir n'est éclairé par aucun arrache-jour ? 

Ceci nous rappelle cette école de Mézidon que l'architecte avait construite sans escalier, et la minoterie Solenge dont les caves n'avaient pas de portes.

 

Mai 1883  -  Plus de cachot. –  Le ministre de l'instruction publique vient d'adresser aux recteurs d'académie une circulaire, dans laquelle il les informe que l'usage du séquestre dans les lycées et collèges doit être abandonné partout.

 

Juillet 1883  -  Faucheuse.    Dans la prairie de Caen, les promeneurs suivent avec intérêt le travail d'une faucheuse mécanique, système Adriance, qui fonctionne pour le compte de M. Mancel, entrepreneur.

 

Janvier 1884  -  Autres temps autres idoles.    Les prières publiques, prescrites à l'occasion de la rentrée des Chambres, ont été dites partout sans cérémonie. - A Caen, le général, le colonel, le premier président, le maire, etc…., y assistaient. On a célébré une messe basse avec accompagnement du Veni Creator. Certains fonctionnaires, nonchalamment étendus sur des chaises, causaient, à haute voix des affaires du jour. Hélas ! que nous sommes loin du temps où M. Mériel et consorts prêchaient en faveur des processions et s'inclinaient dévotement devant le Saint-Sacrement.

 

Janvier 1884  -  L’ouragan.    L'ouragan de vendredi et de samedi a causé de sérieux ravages dans notre région. 

A Caen, les tuiles et les tuyaux de cheminées pleuvaient dans les rues. Samedi soir, un passant, qui se trouvait petite place du Lycée, a été enlevé par un tourbillon de vent et jeté dans la devanture de la boutique de M. Lubin, pâtissier, dont une glace a été brisée. Plusieurs vitraux de l'église Saint-Pierre ont été brisés. La violence de l'ouragan a renversé une des petites colonnettes de l’abside, dont la chute a causé de sérieuses avaries à la voûte d'une chapelle. Une toiture a été enlevée rue Sainte-Paix. 

Dans les campagnes, des arbres ont été brisés. Les toitures en chaume ont été enlevées dans beaucoup d'endroits. Nombre de pommiers ont été déracinés dans le pays d'Auge. 

 

Avril 1884  -  Décès.    M.. Eugène Poubelle, préfet de la Seine, vient d'avoir la douleur de perdre son père. L'inhumation a eu lieu, à Caen, mercredi matin, à Saint-Pierre, en présence d'une foule que nous eussions voulu voir plus nombreuse. Le secrétaire de la société des Antiquaires, dont M Poubelle était membre, a prononcé un discours au cimetière.

 

Juin 1884  -  Les parfums de Caen.    Ne pourrait-on pas mettre un terme à la situation insupportable créée aux riverains du Petit-Odon par les lenteurs du curage ? Depuis quinze jours, l'Odon est à sec. Des personnes sont sérieusement indisposées. 

Est-ce exprès que l'on choisit les jours les plus chauds pour ces travaux ? M. le maire s'est assurément mis le doigt dans l’œil, il peut venir s'assurer de la situation des lieux, mais en ayant bien soin, cette fois, de se le mettre dans le nez.  

 

Juin 1884  -  Un cloaque dangereux.    Les habitants du quartier de l'abreuvoir de la Poissonnerie, à Caen, viennent d'adresser une pétition au préfet pour lui signaler ce cloaque, qui, par ces temps de chaleur, devient des plus malsains. Espérons que cette pétition aura plus de succès que les précédentes, et que l'administration des ponts et chaussées comprendra quelle responsabilité elle pourrait encourir en entretenant un foyer pestilentiel dans cette partie de la ville. 

 

Juillet 1884  -  Insultes à l’armée.    Un colporteur étranger à la ville, âgé de 21 ans, a outragé, par gestes et par paroles, sur le pont de Vaucelles, à Caen, un capitaine sous les armes. Cet individu a été immédiatement arrêté, mais il a fait une résistance énergique, allant jusqu'à mordre les soldats chargés de son arrestation. On dit qu'il était ivre.

 

Septembre 1884  -  A nos édiles.    On nous prie d'appeler l'attention de l'administration sur la place Villers. Elle est dans un état de malpropreté impossible. Dernièrement encore, deux vieux chevaux, appartenant à un maquignon du quartier, y paissaient en liberté au risque de blesser les enfants qui y jouent. Ne pourrait-on pas la faire approprier ? 

Il y a dans le Vieux-St-Etienne un tas de bancs, ne pourrait-on pas également en faire placer quelques-uns sous les tilleuls de cette place.

 

Novembre 1884  -  Petits tapageurs.  -  Est-ce que la loi scolaire n'exige pas la présence à l'école des enfants jusqu'à 13 ans ? Dans ce cas, pourquoi, à Caen, voit-on à cœur de jour des moutards, au-dessous de cet âge, fumant, jouant, faisant un tapage infernal sur la voie publique pendant les classes ?

 

Décembre 1884  -  Pluie et tempêtes.  -  A Caen, la Crétine a monté, mais sans faire de sérieux dégâts. A Bayeux, la crue a été plus grande, plusieurs personnes ont été obligées d'abandonner leurs demeures. A Honfleur, le vent a renversé la baraque du Massacre des Innocents, et occasionné un incendie qui à fait 400 fr. de dégâts.

 

Décembre 1884  -  La tempête.  -  La tempête de vent, de pluie et de grêle, qui règne depuis quelques jours sur notre région, s'est étendue sur toute la France. Partout sur nos côtes, les anciens ne se souviennent pas d'avoir vu pareil coup de vent, un autre est signalé.

Tous les bâtiments sont rentrés au port. Quelques-uns ont brisé leurs ancres et sont venus s'échouer en face de Cherbourg. Le canot de sauvetage de Honfleur est sorti pour essayer de  porter secours à un bateau en détresse en vue de Trouville. Après avoir été ballottés près de deux heures, par une mer furieuse, les courageux marins honfleurais montant le canot sont rentrés au port sans avoir rien vu.

Dans le Midi, la tempête a sévi avec non moins de violence. Dans le Doubs, elle a été suivie d'une chute abondante de neige.

Pendant l'orage, le tonnerre est tombé à Blonville, près Viliers-sur-Mer, sur la maison d'habitation de M Constant Malicorne et a communiqué le feu aux boiseries. En un clin d’œil, la toiture de l'habitation était en flammes.

A Caen, comme partout du reste, les tuiles, les ardoises, et les cheminées volaient en l'air. Sur le Cours, un arbre a été déraciné et a brisé le parapet du pont de l'Hôpital.

Pendant le mauvais temps, cinq jeunes mousses de Port-en-Bessin, s'étaient embarqués sur le nouveau bassin dans un bachot carré très léger, sans doute par suite d'un faux mouvement de l'un d'eux, le bachot coula et tous les cinq furent précipités à l'eau, quatre d'entre eux furent sauvés. Mais le cinquième, le nommé Auguste Vingtrois, âgé de 14 ans, s'est noyé.  

 

Février 1885  -  Tempêtes.  Une tempête s'est fait sentir dans notre région. Dimanche dernier dans l’après-midi, vers 3 heures, une légère secousse, attribuée à un petit tremblement de terre, s'est fait sentir à Caen. L'oscillation n'a duré que deux ou trois secondes. Elle a été précédée d'un bruit assez semblable à celui que ferait une voiture lourdement chargée passant sur le pavé.

A Balleroy et à Vaubabon, des secousses ont été également ressenties. A Littry, un sieur L..., demeurant sur le bord de la route de Balleroy, près la gare, a été secoué d'une façon telle qu'il a perdu l'équilibre et est tombé sur le plancher.

Dimanche aussi, entre 4 heures 1/2 et 5 heures, et à 10 minutes d'intervalle, deux secousses de tremblement de terre ont été ressenties à Villers-Bocage. Un bruit souterrain, ressemblant à celui que produirait une charrette pesamment chargée et lancée au galop dans la rue, a été facilement perçu en même temps que les piles d'assiettes, et les fenêtres étaient ébranlées.

Dans la nuit, la maison du sieur Charles Alexandre Lepetit, journalier à Mesnil-Auzouf, s'est effondrée sous la violence du vent. Le sieur Lepetit, fort heureusement, n'était pas chez lui. 

 

Février 1885  -  La baleine.  -  Le dépeçage en est à peu près terminé. Les os ont été remisés, en attendant qu'on ait édifié, cour des Facultés, la véranda destinée à les recevoir. La  quantité d'huile retirée est estimée de 4 à 5 000 fr., dix pour cent sont alloués à l'homme chargé du travail. Ce marin, un ancien baleinier, a fait frire des pommes de terre avec la graisse et en a fait goûter au maire de Caen, qui les a trouvées bonnes.

 

Février 1885  -  Une ennuyeuse averse.  -  La semaine dernière, une dame qui venait d'entendre la messe à l'église Saint-Julien de Caen, a reçu sur le tête tout le contenu d'un vase nocturne qu'on vidait par la fenêtre sur le trottoir. Au moment où on accuse, à tort, la ville d'être malsaine, il serait prudent de surveiller ceux qui font ainsi servir le trottoir à leurs commodités. 

 

Avril 1885  -  Le jeu des aiguilles.  -  Les riverains de l'Orne, de Caen à St-André, se plaignent vivement des fréquents déplacements du barrage à aiguilles établi près de la passerelle du Grand-Cours. Qu'on l'enlève dans les crues, rien de plus naturel, mais on l'enlève aussi lors des basses-eaux. De là, effondrement des bords, chute des arbres, envasement des abreuvoirs où les bestiaux, ne peuvent plus se désaltérer et impossibilité d'établir des lavoirs fixes qui sont tantôt noyés, tantôt envasés. Ajoutons que ces vases chauffées par le soleil dégagent des miasmes dangereux. L'administration a ainsi installé sur l'espace de deux lieues un vaste foyer de fièvres, qu'il lui serait facile de supprimer en se livrant moins souvent au jeu des aiguilles.

 

Mai 1885  -  Les cimetières.  -  A partir du 1er juin prochain, les cimetières des Quatre-Nations, de St-Nicolas et de St-Ouen seront fermés pour les inhumations en terrain non concédé. Les inhumations des paroisses St-Etienne, St Ouen, Notre-Dame. St-Sauveur, Saint Julien et du Bon-Sauveur auront lieu dans le nouveau cimetière appelé cimetière du Nord-Ouest, route de Saint-Gabriel.

 

Août 1885  -  L’eau à Caen.  -  Depuis une huitaine de jours environ, fonctionne à Gémare la machine à vapeur dont l'installation avait été décidée par le conseil municipal de Caen. Elle permet, quand elle marche, de livrer 1 500 mètres cubes d'eau de plus par jour.

On dit que cette nouvelle installation pourrait bien reculer de quatre à cinq ans la création de ce fameux service des eaux dont il est toujours beaucoup parlé à l'approche des élections municipales.

 

Septembre 1885  -  Explosion et mort d’homme.  -  Jeudi l'après-midi, six kilos de poudre de mine déposés dans le grenier de la maison, de M. Liétot, débitant de tabac et cirier, place Saint-Pierre, à Caen, ont pris feu et ont déterminé une explosion qui a enlevé une partie du toit dont les débris ont été lancés jusque sur le boulevard, sans heureusement atteindre  personne. Les lanternes vénitiennes, les mèches et autres marchandises emmagasinées dans ce grenier se sont vite enflammées, mais, grâce au réservoir d'eau placé dans les combles de la maison, M. Liétot et ses fils, aidés des voisins, ont pu arrêter les progrès du feu, pendant que la police et les pompiers prenaient des mesures pour conjurer l'incendie, dans le cas ou il eût pris de grandes proportions.

Malheureusement, les dégâts n'ont pas été seulement matériels. Un pauvre jeune homme de 16 ans, nommé Lecornu, à payé de sa vie son imprudence, car c'est lui qui a sans doute, en fumant, mis le feu au dépôt de poudre près duquel il était occupé à nettoyer.

Ce malheureux, entouré par les flammes, a été en une seconde couvert de brûlures, il a eu la présence d'esprit de se jeter dans le réservoir d'eau pour éteindre le feu de ses vêtements. C'est là qu'on l'a trouvé. Les premiers soins lui ont été donnés par les docteurs Vigot et Le Bohot, qui ont fait entourer le corps du brûlé d'une couche épaisse de ouate, avant de le faire transporter à l'hôpital, où il est mort dans la nuit après d'horribles souffrances.

Avant d'expirer, Lecornu n'a pas pu parler. Il a essayé de faire comprendre par des signes que le feu se serait communiqué par des allumettes qu'il avait dans sa poche et qui auraient pris feu, mais tout porte à croire que c'est en fumant qu'il aura mis le feu. Lecornu n'était au service de M. Liétot que depuis quelques jours, Il appartenait à la famille Lecornu, ramoneurs.

 

Septembre 1885  -  La population.  -  On vient de publier le tableau officiel du mouvement de la population en 1884. Dans les cinq départements de Normandie, il y a eu excédent des décès sur les naissances. Cet excédent a été, pour l'Orne, de 1 713 décès ; Eure, 1 474 ; Seine-inférieure, 1 424 ; Manche, 1 123 ; Calvados, 1 013. Pour toute la France, l'augmentation de la population a été de 2 pour mille. Sur 11 naissances, il y en a une d'illégitime.

 

Novembre 1885  -  Téléphones.  -  On s'occupe eu ce moment d'installer à Caen un service de téléphones qui permettra aux abonnés de s'entretenir directement avec leurs correspondants des grandes villes, au lieu de leur télégraphier. C'est un avantage très sérieux au point de vue des affaires.

 

Décembre 1885  -  Réseau téléphonique de Caen.  -  Dans une de ses dernières séances, le conseil municipal de Caen a autorisé le maire à contracter un abonnement au réseau téléphonique qui sera organisé dans très peu de temps.

Les Bords de l'Orne   -   Le Barrage à CAEN   -   L.D.

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