1er Juin 2023

UN SIECLE D'HISTOIRE DU CALVADOS Page 7
LANGRUNE s/ MER

Canton de Douvres-La Délivrande

Les habitants de la commune sont des Langrunais, Langrunaises

Janvier 1915  -  Le courrier.  -  A tout seigneur, tout honneur. Nous commençons par la lettre que nous adresse un officier, le capitaine commandant H. Guènebault, du 7e chasseurs. Voici cette missive, éloquente dans sa simplicité. 

Épernay, 29 décembre 1914. Monsieur le Directeur, 

Mon escadron étant en majeure partie composé de Normands, je vous serais très reconnaissant si vous, pouviez leur faire envoyer, par vos lecteurs, quelques vêtements chauds : tricots, chaussettes, gants, ceintures de laine, car, sur les 150 hommes de mon effectif, il y en a environ une trentaine qui n'ont aucune ressource. Si vous obtenez quelque chose, soyez assez aimable de le faire adresser à M. le colonel commandant l'arrondissement d'étapes d'Épernay, pour remettre au 10e escadron du 7e chasseurs. Je vous demande infiniment pardon de la liberté que je prends et vous plie d'agréer, etc…..               H. GUÉNEBAULT, Capitaine commandant. 

Cet appel est pressant et il touchera nos lecteurs, nous en sommes persuadés. Nous sommes navrés d'apprendre qu'il se trouve encore parmi nos défenseurs des braves garçons, des Normands comme nous, qui souffrent du froid et des intempéries. On nous avait dit pourtant qu'il y avait eu une quantité énorme de lainages envoyés à l'année et qu'on avait même du suspendre momentanément les envois. Il faut les reprendre, au contraire, puisque tous nos soldats ne sont pas pourvus. Mais, en dehors de l’intervention officielle, nous espérons bien que nos compatriotes du 7e  chasseurs vont recevoir, à leur tour, quelques chauds vêtements de dessous et que le brave capitaine Guénebault n'aura pas eu tort de compter sur la charité fraternelle.

 

Mars 1915  -  Certificat d’études.  -  Le ministre de l'instruction publique et des beaux-arts a décidé, par une mesure exceptionnelle, d'ouvrir l'examen dans sa session normale à tous les enfants qui atteindront l'âge de 12 ans, le 31 décembre prochain.

 

Mai 1915  -  Le temps qu’il fait.  -  Un maître orage s'est déchaîné mardi sur notre région. Les détonations électriques se succédaient avec une violence extraordinaire et la pluie tombait « d'abat ». En beaucoup d'endroits, la grêle a endommagé les fleurs des poiriers et autres arbres fruitiers. Cette perturbation un peu subite et inattendue est-elle causée par  les commotions anormales que propagent, dans l'air, les canonnades et les explosions ?

 

Mai 1915 Après les naufrages sur les cotes normandes.  -  Nous avons reçu de plusieurs blessés, en traitement dans les stations balnéaires de la côte normande, situées entre Luc et Courseulles, plusieurs lettres qui nous signalaient un fait curieux. Nous avons voulu nous rendre compte par nous-mêmes de l ‘exactitude de leurs dires, et nous venons de faire à pied le trajet Langrune – Bernières-sur-mer. Et voici ce que nous avons vu :  Tout le long, tout le long des plages, au bord de la mer et sur les cordons littoraux de galets et de mouillages, se trouve une exposition ininterrompue de morceaux d’animaux morts. Ce sont des masses énormes de viande en décomposition, surtout des quartiers de bœuf entiers, auxquels les os blanchis par le sel adhèrent encore.

De Langrune à Bernières, nous en avons compté plusieurs centaines ; les amas sont parfois assez rapprochés, parfois distants d’une cinquantaine de mètres. Dans le trajet, nous avons également rencontré quatre cadavres de chiens, dont un parfaitement conservé.  Les lettres que nous avons reçues et des renseignements recueillis, il résulte que ces morceaux d’animaux et ces cadavres proviennent des récents naufrages survenus dans la Manche.  

La grande marée qui vient d’avoir lieu a rejeté toutes ces épaves de chair sur le rivage, avec une régularité surprenante. On m’a assuré que, en deux jours, des habitants d’une de ces plages avaient recueilli à mer basse un tombereau de bois de toutes sortes.  Cependant, il importe de signaler le danger très sérieux qui résulte de ce dépôt de chair en décomposition sur tout ce coin de littoral. Les mouches pullulent sur ces débris, et les charognes. Les plages en ce moment sont fréquentées et parcourues par le grand air pur de la mer. Il est absolument urgent que des mesures promptes soient prises pour l’enlèvement de ces foyers d’infection.

 

Mai 1915  -  Les vaches à l’herbe.  -  Les pluies abondantes et les premières chaleurs ont activé puissamment la végétation et, dans nos herbages, l'herbe pousse dru. Il y en a tant que nous ne pourrons jamais tout manger... c'est à dire, tout faire manger. Car du fait des réquisitions intensives qui ont singulièrement éclairci le troupeau et aussi à cause de l'absence d'un grand nombre de chefs d'exploitation, beaucoup de prairies se trouvent déchargées de bestiaux. Les propriétaires s'inquiètent en pensant que leurs terres vont maigrir, faute de bœufs et de vaches pour les dépouiller et les engraisser. On s'est demandé si on pouvait, aux termes des baux, obliger les fermiers mobilisés à  garnir les herbages  de bestiaux, et M. Fernand Engerand s'est chargé de poser la question au ministre de l'agriculture. Celui-ci a fait la réponse qu'on pouvait prévoir : Il ne saurait être engagé aucune poursuite ni accompli aucun acte d'exécution contre les citoyens présents sous les  drapeaux. Il n'y a donc rien à faire pour l'instant qu'à laisser l'herbe pousser. On la fauchera plus tard, si on peut.

 

Mai 1915  -  La guerre aux mouches.  -  Il est incontestable qu'un grand danger nous menace, cet été, qu'il faut à tout prix détourner. Ce sont les maladies pestilentielles et, en particulier, celle qui peuvent être transmises par les mouches. Dans nos plaines du Nord gisent, hélas des milliers de cadavres en décomposition, plus ou moins recouverts de terre. Des germes morbides vont se développer dans cet effroyable charnier sous l'influence, de la chaleur, et, de proche en proche, les mouches peuvent les propager. Le péril est très grand, il ne faut pas se le dissimuler. Donc, guerre aux mouches meurtrières, guerre chez soi et au dehors. On connaît les moyens à employer : propreté méticuleuse des intérieurs,  et, à l'extérieur, suppression de tous les liquides stagnants, purins, baquets d'eau croupie, mares, etc….., emploi du crézyl et du pétrole pour détruire les larves. 

 

Mai 1915  -  Sinistres épaves.  -  La guerre navale, ou plutôt l'ignoble piraterie allemande, continue de causer la destruction de nombreux navires. Les monstres à figure humaine, qui commettent le crime abominable de couler des navires marchands ou des paquebots et de causer la mort de tant d'innocentes victimes, n'en retirent d'autre profit que la terreur qu'ils inspirent. Des épaves nombreuses couvrent la mer et, sur nos côtes, arrivent, plus que jamais, apportés par le flot, des cadavres d'animaux et des quartiers de viande en putréfaction. Ce sinistre envahissement prend des proportions inquiétantes et, l'autre jour, à Langrune, seize hommes travaillaient à enfouir, dans le sable, ses débris de moutons et d'autres animaux. Il est à craindre que la mer ne mette, de nouveau, à jour ces dangereux foyers d'infection, et il reste certains points de la côte où les précautions nécessaires ne sont pas prises. Sans parler du dégoût que pourrait inspirer un tel voisinage aux baigneurs et aux étrangers qui fréquentent nos côtes, il y a là un très sérieux danger. C'est aux municipalités riveraines d'y parer énergiquement, intelligemment et sans retard.  

Juin 1915  -  Sur le littoral.  -  La guerre nous amene avec les sous-marins et leurs tristes exploits des détritus et des animaux morts de toute espèces. A St-Aubin-sur-Mer, à Langrune, on a fait enterrer ces épaves funèbres.

A Luc, on va les brûler.

Qu’on se hâte, car avec les chaleurs ça ne sentirait pas la rose, au contraire.

 

Juin 1915  -  On réclame.  -  L’enlèvement des animaux morts et autres détritus, véritables foyers d’infection qu’on trouve encore sur nos plages. C’est la marée qui nous apporte trop souvent ces victimes de sous-marins allemands.

Quand la mer se retire, autrement dit à la marée descendante, c’est une insupportable puanteur, et ces émanations peuvent produire des épidémies. Il importe donc de les enlever au plus vite et le plus tôt sera le mieux.

 

Juin 1915  -  Une lettre du Préfet.  -  A la préfecture, on s’est ému des nouvelles que nous avions données, au sujet des détritus de toute sorte et principalement des morceaux de viande pourrie rejetés par la marée sur le sable à proximité des cabines.

Une lettre a été de suite adressée par M. le préfet aux maires des régions que nous avons indiquées, pour les prier de faire enlever ou brûler ces épaves pestilentielles.

Malheureusement, la main-d’œuvre fait défaut : Le garde-champêtre, malgré toute sa vigilance et sa bonne volonté, ne peut faire cette besogne à lui seul, il finirait par y perdre le boire et le manger et il risquerait de tomber asphyxié, tout comme les membres du Conseil d’hygiène publique à Caen, dont la fin tragique explique l’apathie forcée.

 

Juin 1915  -  On réclame des prisonniers allemands.  -  Pour les faire travailler dans le port. En présence de la pénurie de la main-d’œuvre, la Chambre de Commerce, dans sa dernière réunion, a réclamé l’envoi d’une trentaine de prisonniers de guerre allemands.

 

Juillet 1915  -  Échos balnéaires.  -  Le croira-t-on, c’est pourtant la vérité, la saison malgré les moments d’angoisse que nous traversons, promet d’être bonne et, d’ores et déjà sur presque tout le littoral, elle s’annonce sous les meilleurs auspices.

A Luc-sur-Mer, à Langrune, à Saint-Aubin-sur-Mer : Les difficulté dont nous avons parlé, ne sont apaisées généralement entre les propriétaires et les réfugiés. Suivant les conseils donnés par l’excellent curé du haut de la chaire, des deux cotés on y a mis du sien et à très rares exceptions près chacun est resté sur ses positions.

Aussi, le nombre des maisons à louer pour peu que cela continue, sera sans doute inférieur à celui des autres années. 

C’est le cas de suivre l’avis qu’on trouve aux annonces à la 4e page des journaux « Ne pas attendre se presser ».

 

Juillet 1915  -  Échos balnéaires.  -  Moins de monde que de coutume, il faut bien le reconnaître. Cependant, le soir, la digue est arpentée par des groupes de promeneurs et l’on se croirait revenu, s’il en était ainsi chaque soir, aux saisons privilégiées. Malheureusement comme sur toutes les plages à la mode les locations ont été faites généralement jusqu’au mois de septembre prochain. Ce sera le cas de répéter : Que les beaux jours sont courts.

Et les mœurs !

A entendre un de nos confrères, elles seraient choquées à chaque instant par le sans-gêne de certains baigneurs qui sans prendre la peine d’éviter les regards indiscrets apparaissent en moins de temps qu’il n’en faut pour l‘écrire « Dans le simple appareil d’une jeune beauté qu’on arrache au sommeil ».

Heureusement pour eux, n’en déplaise à notre confrère si facilement offusqué, les falaises forment à la base un amas de rochers et de grottes obscures qui remplacent avantageusement les cabines dans lesquelles on étouffe en se déshabillant, et puisque la vertu n’est pas timide au lieu de baisser les yeux, elle peut les tourner d’un autre côté.

La route est belle, la plage aussi… les pauvres gens vont-ils être privés du bain de mer parce qu’ils n’ont pas le moyen de se payer une cabine ? Je sais bien qu’elles ont baissé de prix comme tout le reste, c’est heureux, car plusieurs étaient louées aussi cher que des maisons. N’importe, elles ne sont pas encore à la portée de toutes les bourses et la mer comme le soleil doit être bienfaisante pour tout le monde.

 

Décembre 1915  -  Noyé.  -  On a trouvé à Reviers, prés Creully, le cadavre d’un cantonnier de Langrune, Georges Martin, 48 ans, dans un fossé rempli d’eau. On croit se trouver en présence d’un accident.

 

Mars 1916  -  Une belle histoire.  -  L'aut' sei, qu'il teumbait d'la neige à pouquies, d'vinez qui qu'no veyait dans la campagne, pas bié loin d'Caen ? Un malheureux bouonhomme d'aveuque eune lanterne qui s'en allait d'dreite et d'gauche amont les qu'mins. Ch'était l'père Laveuglette, un renquier du pays, qui trachait partout la bonne, Mlle Lecauflée. Il l'appelait à tue-tête au bout des haies, dans les carrefours et jusqu'à l’entrée des clos et d's'berbages. 

Mais j'vos d'mande un brin qui qu'Lécaudée airait pu faire, la nieut dans les camps, d'çu mauvais temps là.

Alle était bié mieux plachie qu'cha, allez ! Taupette, un ami à elle, étail v'nu la trachi en coupé, s'il vos plait ! Et il l'avait emmenée à Caen, où qu'il l'avait condite au Théâtre où qu'no jouait d'la grande opéra.

Et apreux cha, Mlle Lécaudée et Taupette avaient passé l'reste d'Ieux nieut ensemble et l’coupé n'les avait ramenés que l'lendémain au matin, su la pointe d'onze heures, médi. 

« Dieu sache ! d'où qu'tu viens », dit l'père Laveuglette à sa bonne, en faisant meine d'li prendre la taille.

— J'viens d'Caen, donc ! qu'réponit Lécauffée d'aveuque jactance.

— Ah ! tu viens d'Caen !... r'prit l'bouonhomme, qui n'osait pas  aver l'air de s'fachi. — Et qui qu't'as pu y faire si longtemps ?

Mais il en restit tout bégas et la goule sous l'nez quand sa bonne li réponit en s'foutant d'li :

— Tu ! j'ai vu Rigoleto et j'ai rigolé tard !  

 

Mars 1916  -  Le temps qu’il fait.  -  Depuis trois jours, on est entré dans le printemps et on attend toujours que l'hiver commence. De l'eau ! toujours de l'eau ! (Que d'eau ! Que d'eau !) Un peu de neige, mais plus de gelées, nous n'avons plus que des hivers pourris. Il doit y avoir quelque chose de détraqué autour de nous. Enfin, malgré les jours mauvais, les arbres bourgeonnent, les oiseaux fredonnent, et notre confrère, M. Lebbyteux, fleuronne, car il a un marronnier déjà épanoui dans sa cour. Celui légendaire des Tuileries va en dessécher de jalousie. 

 

Avril 1916  -  Prisonniers de guerre pour les travaux agricoles.  -  Le Ministre de l'Agriculture vient d'accorder au département du Calvados un contingent de 140 prisonniers choisis parmi les hommes exercés aux travaux agricoles. Ces prisonniers pourront être attribués par équipes de 20, non compris la garde. Ils doivent être logés ensemble, mais peuvent être divisés pour le travail en groupe de 5, au minimum. Les Comités agricoles, les Syndicats et les particuliers qui désirent utiliser leur travail, sont priés de faire parvenir une demande à la Préfecture le plus tôt possible, en donnant les détails nécessaires sur l'étendue et la nature du travail à effectuer et sur l'époque où devra commencer le travail.                 

 

Juin 1916  -  Ah ! la guerre.  -  Malgré qu'la guerre sait la calamité des calamités, alle aira tout d'même servi à d'qué, à rapprochi les gens d'bouonne volonté et à leux apprendre à s'rendre service l's'uns és autres.

Ainsi, dans un endreit qu'est pas bié loin du pays des moules, y a mousieu Poivre, qu'est dans l's'épices et qu'a été réformé por sa maladie d'coeu, qui fait du mieux qui peut por ingui ses veisins, et ses veisines itout.

La preuve, ch'est qu'il se mettrait en quatre por soulagi Mme Platec, qui s'trouve, comme bié d'autres pouores femmes, dans l'veuvage de guerre.

Tous les matins, il li décroche ses quartiers, il li eu fait la pesée, il li gratte san billot, il c'menche à li débiter s'n'aloyau et san quasi et à li dégraissi sa t'chulotte.

Faut-y que mousieu Poivre en ait, d’la capacité, por s'être mis si vite que cha à faire un méquier où qu'il n'y foutait goutte !

Mme Platec dait y en saver bougrement du gré, et si a s'empelyait à li faire aver une queroix d'guerre ou aut'chose d'méritoire, m'est avis qu'a n'irait qu'san d'voir.

Et bien p'titement éco !                 

 

Août 1916  -  Épurez ! épurez !  -  Jadis le gaz de houille s'enflammait au simple contact d'une allumette, même de la régie. Parlez de cela aux malheureux abonnés du gaz de  Langrune et de la côte, ils vous diront que non seulement le gaz ne s'enflamme pas quand on lui présente la flamme d'une allumette, mais encore qu'il réussit bien souvent à l'éteindre.                 

 

Septembre 1916  -  Les écoliers aux champs.  -  Le gouvernement fait appel au concours des écoliers pendant les vacances, pour les travaux de la moisson. Le transport vers les exploitations agricoles de la jeunesse scolaire des agglomérations urbaines sera fait, gratuitement, par réquisition, aux frais de l'État. D'autre part, toutes les mesures seront prises pour protéger moralement et matériellement les Jeunes gens des écoles qui auront à cœur de consacrer leurs vacances aux travaux des champs. Les élèves disposés à répondre a cet appel devront se faire inscrire soit à la mairie de leur commune, soit à la Préfecture, office départemental de placement, qui fournira tous les renseignements utiles.

 

Septembre 1916  -  Une chasse qui est ouverte.  -  Tous les jours on apprend que des prisonniers de guerre se sont évadés, mais on ignore, trop qu'il y a deux sortes d'intérêts à favoriser leur reprise. Un intérêt patriotique d'abord : les prisonniers allemand sont des otages qui nous garantissent la vie et la liberté future des Français prisonniers en Allemagne. Un intérêt pécuniaire ensuite : celui qui arrête un soldat allemand en fuite touche une prime de 25 francs. Si c'est un officier qu'il rattrape, il a droit à 50 francs. On peut formuler sa demande de prime en remettant son prisonnier aux gendarmes.

Dans ces conditions, sait-on quel serait le comble de la roublardise pour un prisonnier boche ? Ce serait de proposer à un de ses gardiens de le laisser feindre de s'échapper pour partager ensuite avec lui la prime de rattrapage. Et sait-on quel serait le comble de la « j’en-foutrerie » pour le gardien ?  Ce serait d'accepter le marché et de garder tout pour lui.

 

Septembre 1916  -  Ce que l’on voit en l’air.  -  De magnifiques dirigeables français d'un nouveau modèle ont fait, ces temps derniers, des évolutions au-dessus de la baie de Seine et sur notre côte, l'autre jour, tous les gens de Langrune et de Saint-Aubin avaient le nez en l'air pour en voir passer un. On signale de nombreux cas de torticolis.

 

Octobre 1916  -  On ferme ! on ferme !.  -  Grand émoi, en ce moment, sur nos côtes. On « dérequisitionne » les hôtels et autres immeubles transformés en hôpitaux. Cette mesure prise par M. Godart, sous-secrétaire d'État pour le service de santé, sera bien accueillie. Il est incontestable qu'au début des hostilités, ces installations de fortune rendirent de grands services. Mais, alors que, sur tout le territoire, des usines s'organisaient pour intensifier la fabrication du matériel et des munitions, le service de santé, lui, se montrait réfractaire à tout progrès et à toute amélioration. Au lieu de suivre l'exemple de nos alliés d'Angleterre, qui hospitalisent leurs blessés dans des baraquements spéciaux admirablement aménagés, nous continuons à payer des locations fantastiques pour des immeubles pouvant être appropriés à tous usages, sauf à des hôpitaux. Sur notre côte, de Trouville à Courseulles, le chiffre des locations atteint des centaines de mille francs qu'on eût pu mieux employer. En outre, pendant six à sept mois, l’an dernier, presque toutes ces formations furent inutilisées, faute de blessés. Et pourtant on y conserva les médecins, pharmaciens et autres infirmiers, qui, pour tuer le temps, faisaient du cheval ou de l'auto. Enfin, on a commencé le déménagement, de nombreux blessés, en état d'être évacués, sont déjà partis et, d'ici quelques semaines, la plupart des immeubles seront rendus à leur destination normale. On a mis le temps à apercevoir la possibilité de ces économies et à restituer à la défense de précieuses unités, mais vaut mieux tard que jamais.

 

Novembre 1916  -  La Toussaint.  -  Jamais on ne vit un plus beau temps que celui qui a favorisé la Toussaint, cette année. On se serait cru au mois d'août. Aussi le pieux pèlerinage des cimetières a-t-il été plus suivi encore que de coutume. Les tombes de nos chers morts ont été visitées et fleurie. Mais, en ces tristes jours, que de familles ont pleuré sur des tombes absentes et qui demeureront toujours ignorées ! Du moins, les martyrs qui y reposent n'ont pas besoin de prières.

 

Février 1917  -  La neige.  -  Fortes chutes de neige. Instauration d'une carte de sucre : 750 g par mois et par personne, en trois fois, soit 3 morceaux par jour.

 

Février 1917  -  Le temps qu’il fait.  -  Ces jours derniers, le froid a été un peu moins rude. Le thermomètre a remonté et le baromètre a descendu. Puis ils sont repartis en sens inverse. C'est tout de même le dégel, espérons-le. Mais un dégel sans pluie n'est jamais bien sincère. Il est donc dit que les hivers de guerre sont forcément des hivers froids. On n'a pas oublié celui si terrible de 1870 –71 ! L'hiver de 1917 aurait pu lui faire concurrence s'il avait commencé quelques semaines plus tôt. A présent, nous marchons vers le Printemps, les jours ont déjà rallongé pas mal et dans  l’après-midi le soleil commence à chauffer. Mais, c'est égal, cette année le proverbe pourrait bien mentir qui assure que « Jamais février  n'a passé sans voir groseillier feuillé ». 

 

Février 1917  -  Allô ! allô !.  -  Si vous désirez téléphoner avec les départements limitrophes, l'administration des postes vous fait signer un papier dans lequel vous vous engagez à ne fournir aucun renseignement concernant la défense nationale. Dans le cas où vous violeriez cette clause, on vous couperait... devinez quoi ? Pas la tête, ce que vous mériteriez pourtant, mais simplement la communication. A la bonne heure ! voila, un régime vraiment paternel ! 

 

Mars 1917  -  Réquisition du blé et recensement des pommes de terre.  -  Le préfet du Calvados je viens de prescrire dans toutes les communes du département le recensement des quantités de blé et de pommes de terre existant chez les cultivateurs et les commerçants.

C'est aujourd'hui, dimanche 11 mars que les déclarations des détenteurs seront reçues dans les mairies. Tout détenteur à l'obligation de faire sa déclaration à la mairie de son domicile. En même temps, la réquisition générale des blés est prononcée.

À partir de demain, 12 mars, aucun blé existant dans le Calvados ne pourra plus être vendu, ni transporté que sous le couvert d'une mainlevée de réquisition délivrée par le président de la commission de réception et contresignée par le maire.

Les commissions de ravitaillement opéreront prochainement des réceptions de blé. Les réquisitions seront transformées pour les quantités qui leur seront livrées en achats à à caisse ouverte. Il est inutile d'attirer l'attention des cultivateurs et détenteurs de blé sur l'intérêt que présenteront pour eux, dans ces conditions, les prochaines réceptions.

 

Avril 1917  -  Les émigrés.  -  150 émigrés des pays envahis et reconquis, à l'heure présente, mais dans lesquelles on aperçoit ruines sur ruines, vont être dirigés sur le littoral, où nombre de villas seront mises à leur disposition.

 

Avril 1917  -  Les trains.  -  Le fait est confirmé par une affiche dont nous publions le texte ci-dessous, que la Compagnie de Caen à la mer a bien mérité des parisiens et des habitants du littoral pour sa louable initiative de deux trains supplémentaires pour le dimanche et le lundi de Paques.

En raison des difficultés et de la crise des transports, on ne saurait trop se montrer reconnaissant à la Compagnie de Caen à la mer des efforts qu'elle fait pour arriver à contenter tout le monde. 

 

Avril 1917  -  Voul’ous vend vos caudières ?  -  L'État cherche à acheter du cuivre et, de préférence, en France. Aussi a-t-il fait savoir qu'on pourrait lui proposer les alambics devenus sans usage, depuis la loi sur l'alcool. Mais peut être nos bouilleurs auxquels, avec cruauté, on a leur crû ôté, aimeront-ils mieux les conserver quand même. On ne sait jamais ce qui peut arriver !

 

Avril 1917  -  Les enfants de Reims dans le Calvados.  -  On annonce l'arrivée, prochaine dans notre département d'un millier d'enfants, de 6 à 14 ans, évacués de Reims. Les personnes qui désireraient recueillir un ou plusieurs de ces enfants sont priées d'en donner avis à la mairie de leur résidence.                 

 

Avril 1917  -  Jour de deuil.  -  Gros émoi, ces jours-ci, parmi nos riches possesseurs d'autos. Malgré que plusieurs aient soigneusement caché leurs voitures, on les a dénichées et réquisitionnées. L'un d'eux a vu prendre la sienne qui lui avait coûté, assurait-il, 22 000 frs. Un autre, gros bonnet municipal, avait muchi son auto chez un ami et se servait d'un mauvais « taco ». On l'en a dépouillé aussi, pas du « taco », mais de la bonne voiture. Sa mauvaise humeur n'a pas émotionné le moins du monde l'officier acheteur. Pauvres gens ! faudra nous coucher pour les plaindre !

 

Mai 1917  -  Violentes détonations. -   A propos de violentes détonations, qui faisaient trembler les vitres et les fenêtres des maisons, jeudi dernier, à 7 h. 1/2 du soir; chacun, très intrigués a voulu dire son mot pour expliquer ce chambardement.

La majorité des gens croyait au torpillage d'un navire, d'autres  supposaient qu'un bateau venait d'éclater après avoir heurté une mine. Beaucoup de gens croyaient avoir vu deux sous-marins en regardant avec une lunette d'approche.

La vérité, c'est que des canons, placés dans un endroit dont nous nous gardons bien de dire le nom, faisaient des tirs d'essais, sur la mer, à longue portée. Ces tirs se sont renouvelés vendredi matin, vers 7 heures. 

 

Juin 1917  -  Le temps qu’il fait.  -  II a plue le jour de la Saint-Médard et bruiné seulement le jour de la Saint-Barnabé. Cela autorise à la fois nos craintes et nos espérances les orages ne semblent pas avoir trop fait couler les fleurs des pommiers, il y a toujours belle apparence. Au moins, si la on nous mesure le manger, que nous ayons de quoi boire ! 

 

Juin 1917  -  Pour la mobilisation civile.  -  Tout homme de 16 à 60 ans, non présent sous les drapeaux, est tenu de faire sa déclaration à la mairie de la commune où il se trouvera dans la nuit  du 7 au 8 Juillet.

 

Juillet 1917  -  Les orages.  -  L'été qui vient de commencer ne semble pas devoir tenir les promesses d'une belle saison que le printemps nous avait permis d'espérer. Depuis quelques semaines, en effet, les orages se multiplient avec une fréquence malheureuse et tentent de compromettre nos récoltes dont nous avons tant besoin. Celle du foin, notamment, qui s’annonçait si belle, est presque anéanti par endroits. Au début de la semaine dernière, un fort orage a dévasté une partie de l'arrondissement de Lisieux, de nombreuses communes ont été très éprouvées à Notre-Dame-de-Courson, notamment, l'eau a atteint, en certains endroits, deux mètres de hauteur. La plupart des foins ont été emportés et ceux, restant à couper sont envasés et considérés comme perdus. Un boulanger de cette commune, M. Lecomte, qui faisait, à ce moment, une tournée en voiture, à Moutiers-Hubert, fut jeté, avec son attelage, par la violence du courant, dans un fossé. Il ne s'en serait pas tiré sans l'intervention de M. Bertheaume conseiller municipal. Il fut  recueilli, ainsi que ses deux fillettes de 11 et 8 ans, qui l’accompagnaient, par Mme Lemeunier, qui passa la nuit à réconforter les deux pauvres gosses mortes de peur. A Fervaques, à  Saint-Martin-de-la-Lieue, à Saint-Germain-de-Livet, les dégâts sont aussi importants. Rien qu'entre Prêtreville et Saint-Martin-de-la-Lieue, on évalue à 25 000 fr. la perte des foins. Dans le pays on compare cet orage à celui de 1875, qui causa la mort de plusieurs personnes et dévasta les vallées de Courtonne et d Orbec, ainsi que les bas quartiers de la villes de Lisieux. Un orage, d'une aussi grande violence, a éclaté samedi soir sur nos côtes. Luc, Langrune, Saint-Aubin, Bernières et Courseulles ont été particulièrement éprouvés. On ne signale aucun accident de personnes.

 

Juillet 1917  -  La Poste aux pays des crabes.  -  Depuis la guerre, le courrier postal du matin, qui desservait la côte, de Luc à Courseulles est supprimé. C'est le train de Caen à la Mer qui maintenant emporte les correspondances et, comme le premier départ de Caen est à 9 h. 30, on voit d'ici à quelle heure elles sont livrées à leurs destinataires. A Langrune, au centre des affaires, les plus favorisés reçoivent leur courrier entre 3 heures et 3 h. ½, pour ceux qui habitent à l'extrémité du bourg, ils sont tout heureux quand ils le reçoivent à cinq heures. Il nous semble qu'à ce moment de l'année où la population a notablement augmenté, la direction des postes du Calvados aurait quelque chose à voir par là.

 

Juillet 1917  -  Une femme imprudente.   -  Une femme ayant commis l'imprudence de se baigner, en chemise, eut le regret de la perdre et fut obligée de regagner son domicile heureusement très proche dans le plus simple appareil. 

 

Juillet 1917  -  Congestion mortelle.  -  Le pêcheur Varin, âgé de 61 ans, est mort subitement en rentrant à son domicile samedi matin revenant de la pêche. On suppose qu'il a été frappé de congestion.

 

Juillet 1917  -  Le sucre pour les baigneurs.  -  Les personnes séjournant pendant plus de dix jours dans une station balnéaire peuvent y toucher les coupons de leur carnet de sucre qui correspondent à la durée de leur villégiature. Ill leur suffira de faire viser au secrétariat de la Mairie de leur résidence temporaire la carte de sucre qui a dû leur être délivrée au  lieu de leur résidence habituelle, En ce qui concerne les familles dont un ou plusieurs membres seulement se sont déplaces, ces derniers pourront se faire délivrer, dans la localité où ils séjournent, une nouvelle carte contre justification de leur radiation sur la carte primitive qu'ils ont reçu précédemment à leur domicile habituel.

 

Août 1917  -  Le temps qu’il fait.  -  Après quelques journées d'une chaleur excessive, des orages ont éclaté un peu partout, dans notre région, retardant la récolte du foin qui, jusqu'ici, s'opérait sans encombre. Pour quelques jours le temps est redevenu maussade, pluvieux et froid. Espérons que ça n'est qu'une mauvaise passe.

 

Août 1917  -  L’église s’adapte ! -  Les temps que nous vivons ne permettent guère la minutie des anciennes observances religieuses, aussi le Pape s'est-il décidé à les abolir en notable partie. Désormais, l'usage des oeufs, du laitage et de la graisse sont permis en tout temps, même pendant le carême et les jours de jeune. On peut aussi manger de la viande et du poisson. Les vendredis et samedis sont, maintenant, jours de jeune et d'abstinence pendant le carême. Resteront cependant à observer le mercredi des Cendres, les quatre-temps et les veilles de fêtes jusqu'à midi seulement. L'avance de l'heure n'est pas prévue.

 

Août 1917  -  Aux champs. -  Pendant qu'un certain nombre de cultivateurs se plaignent amèrement du manque de main-d’œuvre, on dit qu'il en est d'autres qui en trouveraient facilement s'ils se résignaient à la payer ce qu'elle vaut. On prétend aussi que certains usent et abusent des enfants d'hospice qui leur sont confiés. On nous en signale même, assez prés de Caen, chez lesquels les malheureux gosses sont accablés de si rudes tâches qu'ils en deviennent difformes. 

Comme salaire, ces enfants ont des coups. Les quelques journaliers restant les communes, excédés de travailler à un taux dérisoire, sont partie dans les usines voisines. Et pourtant le mois d’août et il pleut sur notre pain.

 

Août 1917  -  L'écho des plages.  -  À l'hôtel Cauvin, si justement renommé, les demandes affluent chaque jour. Les familles ont pris possession de leur villa, très heureuses de pouvoir trouver le calme et le bien-être qu'on ne trouve pas si facilement ailleurs. La plage est superbe. On voit que l'œil du maire ou du maître veille à tout.

 

Août 1917   -  L'écho des plages.  -  La grande distraction, le soir, consiste à manger de la gui-gui. Cela vaut mieux, somme toute, que de sucer de la glace ou de se piquer le nez outre mesure. Le marchand de gui-gui fait des affaires d'or, il vend plus de 2.000 bâtons chaque soir, c'est le maréchal de la gui-gui. Le fait est qu'il en mérite bien le bâton, puisqu'il le fait savourer à tout le monde.

 

Août 1917   -  Un Cyclone.  -  Un véritable cyclone vient de ravager notre région, renversant les arbres sur les routes et sur les boulevards de notre ville, coupant les fils électriques, si bien que les communications télégraphiques ont être interrompues, avec Paris notamment, et que l'électricité manqua dans la nuit de lundi à mardi.

Mardi matin, les routes, les cours et les places publiques étaient jonchés de feuilles et de branchages, les rues de débris de cheminées et de pots de fleurs renversés par le vent, et l'on voyait, de ci, de la, des brouettes, et même des camions, que des personnes économes et prévoyantes remplissaient de bois qu'elles ramassaient un peu partout, en prévision de cet hiver, ou la pénurie de charbon pourra encore se faire sentir.

Mais ce qu'il faut déplorer, ce sont les gâts considérables causés aux arbres fruitiers par cet ouragan en particulier, et en général par ces pluies diluviennes que nous subissons quotidiennement depuis un mois et qui ont fait pourrir aux arbres tous les fruits qui, cette année, étaient particulièrement beaux et nombreux.

 

Août 1917  -  Sur les plages. -  Par arrêté préfectoral, tous les cercles fonctionnant dans les stations balnéaires du Calvados devront être fermés. Seront également fermés tous débits de boissons, estaminets, restaurants et bars attenant aux casinos de ces stations. Seules resteront ouvertes les salles de spectacle, à l'exclusion des salles de concert ou de danse, dont la fermeture a été prescrite précédemment.

 

Août 1917  -  Situation agricole.   -  Voici quelle était au 1er août dernier la situation agricole dans le département du Calvados, telle qu'elle est donnée à l'Officiel. La végétation a été activée en juillet par un temps chaud et humide, souvent orageux, qui a favorisé aussi le développement des maladies cryptogamiques. Les blés sont fort irréguliers. De nombreux champs sont clairs. D'autres se ressentent du manque de fumure.
Dans les meilleures parcelles, la production si atténuée par l'échaudage, le piétin, la cécydomie. Le rendement moyen sera faible, malgré l'amélioration constatée dans ces derniers mois. La moisson est à peine commencée. L’orge se présente bien jusqu'ici. L'avoine est moins satisfaisante. Les avoines d'hiver se ressentent, comme le blé, des rigueurs de la mauvaise saison. Les betteraves n'ont, reçu que des façons culturales tardives ou insuffisantes. La pomme de terre, qui se développait admirablement, est atteinte presque partout par le mildiou.

La fréquence des pluies dans les trois premières semaines du mois a contrarié la rentrée des sainfoins et la récolte des foins naturels. La première coupe des fourrages est moins abondante qu'en année moyenne. Elle est même faible dans beaucoup de sainfoins ravagés par les campagnols. Dans les vallées basses, la qualité des foins naturels est dépréciée par les inondations survenues à la suite des pluies orageuses. La production des fruits de pressoir ne répondra pas aux premières espérances. On n'escompte plus maintenant qu'une récolte moyenne.

 

Septembre 1917  -  L'écho des plages.  -  Les départs ont déjà commencé, principalement à Langrune-sur-mer. Aussi les trains via Caen à la Mer, sont-ils généralement surchargés

 

Novembre 1917  -  Alarmes et potins.  -  Un peu partout, sur nos cotes, on a procédé, ces soirs derniers, à des extinctions générales des feus. Les gardes champêtres se répandaient sur les routes et dans les carrefours en tapant sur leurs peaux-d'àne et prescrivaient aux habitants d'avoir, la nuit venue à ne pas allumer leurs chandelles ou a les muchi. On a agi ainsi presque sur tout le littoral, du Havre à Cherbourg, il s'agissait probablement d'expériences d'invisibilité du territoire utiles à sa défense. Mais pourquoi ne pas l'avoir dit tout bonnement au lieu de laisser les gens clabauder à perte de vue sur ces mystérieuses alertes. Aussi fallait entendre les langues marcher : « Ch'est des sous-marins ! » disait l'un : « Non, ch'est des zeppelins », disait l'autre. Ils ont coulé dix-huit navires, affirmait un troisième. Chat ! insinuait un quatrième, « je sais pertinemment qu'il s'agit de surprendre un torpilleur français qui, chaque nuit, ravitaille les sous-marine boches. » Et cela continuait sur ce ton ! De grâce quand on demande aux gens de faire quelque chose, qu’on leur dise donc pourquoi, quand ce ne serait que pour les empêcher d'inventer tant de bêtises.

 

Décembre 1917  -  A tâtons.  -  Les habitants de la côte ayant des fenêtres sur la mer sont invités a voiler complètement leurs lumières pendant toute la nuit.

 

Décembre 1917  -  Essence pour les battages.  -  Les entrepreneurs et cultivateurs qui ne peuvent se procurer dans le commerce l'essence nécessaire à leurs battages, sont informés qu'il peut leur être délivré à la Direction des services agricoles, rue de Bernières, 16, un bon d'essence livrable de suite par la sous-intendance militaire de Caen.  

Janvier 1918  -  Héroïsme d’un remorqueur et d’un chaland.  -  Au large du Calvados, le 25 janvier, un grand sous-marin en surface rencontra un chaland de mer traîné par un remorqueur et s'en approcha rapidement. Alors le capitaine du remorqueur fit couper les amarres et forcer l'allure de la machine et courut au-devant de l'ennemi. Le tir fut très bien réglé des deux côtés.

Dès le début du combat auquel prit part aussi le chaland et chacun des adversaires se trouva encadré par les projectiles de l’autre. Cependant le troisième obus du remorqueur étant tombé tout près du canon arrière et le quatrième obus sur le kiosque du sous-marin, celui-ci plongea. Des patrouilleurs que les détonations avaient fait accourir croisèrent longtemps dans les parages de la rencontre sans revoir l'ennemi.

 

Juillet 1918  -  Malgré la sécheresse de cette année, la récolte sera excellente.  -  Depuis un mois, nous subissons une période de sécheresse persistante. Les paysans s'en plaignent. Y a-t-il lieu, cette fois, de les écouter ? A l'Institut agronomique, on nous a fait ce matin la claration suivante : La sécheresse n'est pas, dans toute la France, aussi absolue qu'à Paris. Certaines régions, notamment le Nivernais, le Limousin, la Limagne sont demeurées pluvieuses jusqu'à ces temps derniers.

Dans les autres régions, les conséquences de la sécheresse ne sont pas partout les mes. Elles se font d'autant moins sentir que le sol est plus fort.

D'une manière générale, la sécheresse n'a pas été assez grande jusqu'à présent pour qu'on puisse s'en inquiéter beaucoup. Il est permis d'espérer, pour cette année, une colte comme nous n'en avons pas eu depuis sep ans. La seule conséquence de la sécheresse sera que les blés mûriront plus vite. Les moissons auront lieu dés la fin de juillet, mais il y aura moins de paille. Les avoines souffriront plus et aussi les regains, seconde coupe des fourrages, qui ne peuvent se velopper sans humidité. Nous devons dire toutefois que la première coupe a été exceptionnellement belle. 

La culture de la betterave s'attardera si la sécheresse persiste au-delà de la mi-juillet. Jusqu'à présent, il n'y a guère que la culture maraîchère qui ait réellement souffert, mais elle a beaucoup souffert.

 

Septembre 1918  -  Plus d’essence, ni de pétrole.  -  Le préfet du Calvados a fait connaître qu'il vient de lui être notifié que tous transports de trole et d'essence autres que ceux faits pour l'armée étaient totalement arrêtés jusqu'à nouvel ordre, tout le matériel devant être rendu immédiatement disponible.

 

Septembre 1918  -  Chemins de fer de Caen à la mer.  -  Les rapports des chefs de services pour le conseil général viennent d'être distribués. Du rapport du service vicinal, chemins de fer d'intérêt local, nous extrayons ce passage, concernant la ligne Caen-Courseulles des chemins de fer de Caen à la mer, dont tous les Caennais et Parisiens ont pu constater le délabrement pitoyable et le déplorable laisser-aller :                 

 - Voies : Ballast à purger et à compléter sur divers points. Fossés négligés… l'entretien laisse à désirer. Grand nombre de traverses à remplacer. Ouvrages métalliques à réparer, peinture à refaire. Passage à niveau dans un état d'entretien insuffisant. La ̃peinture des poteaux indicateurs est refaire.
 - Matériel - L'état des locomotives est, satisfaisant. Celui des voitures et des wagons est très médiocre. Ce qui n'a pas empêché la compagnie de supprimer les aller-et-retour tout en augmentant, ses tarifs de 30 %. C'est la guerre. Mais tout de même. 

 

Novembre 1918  -  L'armistice.  -   Le lundi 11 à 11h 15, le préfet du Calvados reçoit et diffuse la dépêche officielle annonçant que les hostilités ont cessé à 11 heures. Plusieurs jours durant, d'énorme manifestations de joie spontanées

 

Mai 1919  -  Le temps qu’il fait.   -  Une effroyable tempête a soufflé ses jours derniers, lacérant les premières feuilles et arrachant les premières fleures.

Malgré l'arrivée des hirondelles, le printemps ne peut se décider à faire son entrée. La végétation s'en trouve très retardée. Pourtant jamais une année d'abondance n'eût été aussi nécessaire. Fort heureusement, jusqu'ici, rien n'est sérieusement compromis et il est toujours permis d'espérer. (Source  : Le Bonhomme Normand)

 

Juin 1919  -  Le temps qu’il fait.   -  Il ne faut jamais se plaindre que la mariée soit trop belle, dit-on, mais on peut parfois — comme en ce printemps — regretter que le temps demeure implacablement magnifique. La sécheresse devient inquiétante ; les céréales commence à en souffrir sérieusement. 

II y a aussi des chenilles en quantité et on dit qu'en certains endroits les premières pommes n'ont pas noué. Saint-Médard, cette année, n'a rien voulu savoir et il a remisé son arrosoir. Il était vexé, sans doute, de voir sa tête tomber le jour de la Pentecôte et passer inaperçue.  (Source  : Le Bonhomme Normand)

 

Juin  1919  -  Désespérée.   -  Ces jours derniers, une dame Jeanne Renouf, 29 ans, demeurant momentanément dans une maison, de la rue de Saint-Aubin, à Langrune. s'est suicidée en absorbant du laudanum et en s'asphyxiant avec du charbon de bois. On attribue cet acte de désespoir à des chagrins intimes. (Source  : Le Bonhomme Normand)

 

Juin  1919  -  Suicide.  -   Samedi dernier, Mme veuve Renouf, couturière à Caen, 76, rue St-Jean, se rendait à Salnt-Aubin-sur-Mer pour assister à la première communion de sa petite fille. A son arrivée, une lettre de sa fille Jeanne, couturière à Langrune, rue de Luc, n° 6, lui fut remise. Celle-ci se plaignait que la vie était trop dure pour elle.

Pressentant un malheur, Mme Renouf se rendit au domicile de sa fille. Les portes étaient calfeutrées. Dans une pièce, des résidus de charbon de bois achevaient de se consumer dans une bassine. L'asphyxie avait fait son œuvre, le cadavre violacé de la désespérée reposait sur un lit. (Source  : Le Moniteur du Calvados)  

 

Novembre 1919  -  La vague de froid atteint l’Ouest.  -   Par un froid vif la neige est tombée abondante, couvrant la campagne. La neige tombe dans le Var.  -   La neige est tombée chaque nuit depuis dimanche sur tous les points d'une certaine altitude dans le nord du département et du Var, dans le centre et dans les Basses-Alpes.

 

Septembre 1920  Un étudiant irascible.  -   M. Marcel Achard, 17 ans, étudiant, demeurant à Bois-Colombes, et actuellement avec sa famille à Langrune, s'était amusé a plaisanter un pêcheur, M. Paysant. Ce dernier l'avertit charitablement qu'il eût à cesser ses quolibets. Marcel Achard. mortifié, donna un violent coup de poing au pêcheur qui a porté plainte contre l'étudiant trop narquois.

 

Octobre 1920   -   Un horsain malappris.   -  Un étudiant de Bois-Colombes, Marcel Achard, 17 ans, en villégiature à Langrune-sur-Mer, s'est permis, certaines plaisanteries à l'égard de M. Paysant, un pêcheur de l'endroit. Celui-ci s’est fâché. L'étudiant s'est oublié jusqu'à porter un coup de poing au pêcheur, qui lui, à son tour, a porté plainte. (Source  : Le Bonhomme Normand)

 

Juin 1921  -  Recensement.  -  Le recensement dénombre 372.380 habitants dans le Calvados : il y en avait environ 500.000 en 1826.

 

Juillet 1921  -  LA sécheresse.  -   Une sécheresse persistante rosit les herbages et provoque des incendies de récoltes et de bois. Les éleveurs vendent en masse leur bétail sur pied,  mais la chute des  prix n'est pas répercutée au détail.

 

Juillet 1921  -   Les dangers du cinéma.   -   A la représentation d'un cinéma installé dans la salle des fêtes de Langrune-sur-Mer, un film a pris feu et l'incendie menaçait de s'étendre assez rapidement. Ce fut un sauve qui peut général parmi les spectateurs qui fort heureusement n'étaient pas très nombreux, et l'on réussit à faire évacuer la salle. Le feu put être maîtrisé par les pompiers.

Les dégâts sont élevés et la salle des fêtes hors de service pendant quelques temps, ce qui tombe fort mal au début de la saison. (Source  : Le Bonhomme Normand)

 

Juillet 1921  -   Les dangers du bain.   -   Quatre baigneurs qui s'étaient aventurés sur le rocher des Essarts, à marée montante. allaient certainement être noyés sans l’intervention d'un marin-pêcheur de Langrune-sur-Mer, M. Paisant et son fils, qui aillèrent avec leur barque sauver ces imprudents. (Source  : Le Bonhomme Normand)

 

Août 1921  -   A Langrune.   -   Cette charmante station balnéaire a en trois jours de fête des plus réussies, retraite aux flambeaux, bal, feu d'artifice, etc..., sans oublier d'intéressantes et artistiques cérémonies religieuses. Les dévoués organisateur, MM. Quentin, Stiskin, Delmas et Lepingard, ainsi que les artistes de talent qui ont prêté leur concours à ces joyeuses journées, méritent d'être vivement félicités.  (Source  : Le Bonhomme Normand)

 

Septembre 1921  -   Mauvaise donne.   -   Chargée de la caisse de la boulangerie, Émilienne Delaroche, 24 ans, servante chez M. Seigneur, boulanger à Langrune-sur-Mer, en a profilé pour faire son beurre.

Son patron ayant des soupçons, la mit a la porte. Le jour de son départ, la fille Delaroche, le voyant à la gare, fut prise, de peur et s'enfuit. M. Seigneur la rattrapa et la conduisit à la gendarmerie, où elle avoua lui avoir volé 300 francs pour acheter des effets pour elle et son enfant de 8 mois. On l'a envoyée à la maison d'arrêt de Caen. (Source  : Le Bonhomme Normand)

 

Août 1922  -  La tempête sur nos cotes.  -  Pendant l'avant-dernière nuit la tempête a fait rage sur le littoral du Calvados. Sur les plages il a fallu, en de nombreux, endroits,

 déménager les cabines de  bains. La marée montante a atteint partout des limites depuis longtemps inconnues.

 

Avril 1923   -  Sur la cote.   -   Les premiers beaux jours ont ramené les étrangers sur nos côtes avant même que les hirondelles n'y soient revenues et déjà des locations sont faites pour la saison. Certaines ont été conclues à des conditions plus avantageuses encore que l'an dernier (pour les propriétaires s'entend). Il devrait pourtant y avoir des limites à cette ascension des loyers et le record de la hauteur devrait être depuis longtemps établi. (Source : Le Bonhomme Normand)

 

Mai 1923   -  La terre contre la mer.   -   Il existe un « Syndicat d'expansion économique du littoral bas-normand » dont les intentions sont excellentes mais le titre un peu long. Quand donc comprend!a-t-on que pour, qu'une entreprise soit[1]connue, approuvée, aidée, il lui faut, une étiquette facile à retenir. Ce syndicat, s'est réuni, ces jours-ci. pour étudier les moyens de défense de nos côtes contre la mer.

On a résolu de résister jusqu'à la gauche... du département à tous les projets saugrenus dont diverses administrations nous menacent et surtout à l'endiguement de l'estuaire de la Seine. Bravo ! Pourvu qu'il y ait des actes au bout de ces paroles. (Source : Le Bonhomme Normand)

 

Juin 1923  -  L'électrification ne pourra être réalisée que dans un avenir assez lointain.  -  On parle beaucoup aujourd'hui d'électricité à la campagne. Les applications de cette force mystérieuse sont si nombreuses, si variées et si enchanteresses que chacun en attend merveille quand elle sera devenue paysanne, rurale et agricole. On dirait presque qu'elle est de la catégorie de ces gens qui s'estiment trop distingués pour venir habiter la campagne. Du moins, dans notre région, il parait qu'elle se plaise surtout en ville. Pourtant beaucoup de soldats se rappellent l'avoir trouvée moins revêche à se mettre en sabots en certaines régions qu'elle ne dédaignait pas d'embellir et d'animer jusque dans leurs coins les plus reculés. Depuis ce temps, ils rêvent de la voir venir chez eux, et l'appellent de tous leurs vœux.

Encouragements donnés par la loi. -  La question de l'électrification des campagnes et à l'ordre du Jour, apporter les bienfaits et le charme de l'électricité jusqu'au fond des villages les plus reculés, n'est-ce pas y attacher et y retenir le paysan trop souvent attiré par le mirage des villes ? C'est ce qu'ont pensé le Gouvernement, qui a élaboré, et la Chambre des députés, qui a voté dernièrement, d‘une très forte majorité, un projet de loi pour favoriser l'accès de l'électricité dans les campagnes.
D'après cette loi, le Gouvernement ne se chargerait pas lui-même de fournir l'électricité aux intéressés, ce dont on peut se féliciter, mais il viendrait en aide aux sociétés coopératives d'électricité ou organismes analogues, et cela de deux façons par des prêts à taux réduits, par des subventions. L'État s'engage, d'une part, a faire par l'intermédiaire de l'Office National du Crédit agricole, des prêts pour un montant maximum de 600 millions, et pour une durée maximum de 40 années, à un taux qui ne
devra pas dépasser 3 %. Mais les sociétés d'intérêt collectif pourront seules être admises à bénéficier de ces avantages, à l'exclusion des particuliers.

 

Juin 1923  -  Une vague de froid.  -  Le thermomètre continue de se livrer aux pires extravagances ; en plein mois de juin, on enregistre des température dignes du mois de mars. Au dire des vieillards, jamais on ne vit pareil phénomène; par contre il est certain météorologistes qui affirment, en contradiction avec l'ensemble des humains, que ce temps-là n'est pas anormal ! Ils auraient meilleure grâce a avouer franchement qu'ils sont incapables de l'expliquer.
Ces jours-ci, nous signalions des chutes de neige dans les Alpes et dans les Vosges; aujourd'hui, des dépêches annoncent que 1a vague de froid s'étend un peu partout. Il gèle en Bourgogne. Le mauvais temps persiste à Chalon-sur-saône, et dans plusieurs régions de la Bourgogne, on constate, le matin, de la gelée blanche. Les récoltes et les vignes souffrent de cette température.
Et en Auvergne, d'après des renseignements parvenus de tous les points de la région, les gelées ont causé de sérieux dommages aux récoltes, particulièrement dans les jardins. Les vignes et les plantations de pommes de terre ont également beaucoup souffert.

 

Juillet 1923   -   Ceux qu’on écorche.   -   Une lectrice, en villégiature sur la Côte, nous envoie ces doléances :

Pendant, que les fromagers paient aux cultivateurs le lait 0 fr. 30 le litre, celui-ci le vendent aux baigneurs 0 fr. 80, pris chez eux. Comment trouvez-vous la différence ? De passage à Caen, j'ai payé un litre de lait 0 fr. 70 chez un coquetier qui pourtant devait avoir son petit bénéfice. Il me semble donc que si le cultivateur peut apporter du lait à Caen pour 0 fr. 60, il doit le donner au moins au même prix quand on vient le prendre chez lui. Le lait est pourtant aussi nécessaire que le pain. On croit que tous ceux qui viennent, à la mer ont les moyens d'y être volés sur ces aliments et sur autre chose.

Erreur profonde ! Tous les baigneurs ne sont pas là par plaisir, beaucoup y sont par raisons de santé et font parfois de lourds sacrifices pour, suivre une ordonnance de médecin. N'ont-ils pas déjà assez de malheur sans qu'on les exploite. Et s'il n'y avait que le lait ?…

Nous avons plutôt adouci les termes de cette lettre que nous trouvons navrante en ce sens que les faits qu'elle décèle amèneront fatalement peu à peu la désertion de nos plages. C'est l'éternelle histoire de la poule aux œufs d'or, quand on la tue, elle ne pond plus. (Source : Le Bonhomme Normand)

 

Septembre 1923  -  La tempête sur nos cotes.  -  Une violente tempête a sévi sur nos côtes bas-normandes. Les lames déferlèrent avec une véritable furie et atteignirent parfois une grande hauteur.
A Langrune-sur-Mer, une douzaine de cabines ont été brisées ou enlevées de leurs emplacements plusieurs escaliers de la digue démolis par la violence des vagues. Entre Saint-Aubin et Langrune, un canot de plaisance dut être pris en remorque au moment les  baigneurs qui le montaient étaient impuissants, à le diriger. Le cyclone a exercé ses ravages dans plusieurs communes, et des arbres sont tombés.

 

Mars 1924  -  Un accident.  -  On a appris le tragique accident d'automobile dont le sympathique député de Caen, M. Blaisot, fut victime le 22 juillet dernier, à Langrune-sur-Mer.

Notre éminent concitoyen qui avait présidé le matin une cérémonie patriotique à Cabourg, organisée par la municipalité de Saint-Aubin, M. Bertrand, maire de Cabourg, demanda à MM. Ruault et Chapel de mettre une voiture à la disposition de M. Blaisot. L'auto était conduite par M. Gustave Gosselin, chauffeur au service des garagistes précités. La voiture marchait à une allure très rapide lorsqu'en suivant l'Avenue de l'Est à Langrune-sur-Mer, M. Gosselin aperçut tout-à-coup, un attelage qui débouchait de la rue des Murs, à 100 mètres de l'auto.
Il fallut exécuter un virage pour prévenir une collision inévitable. Mais l'automobile alla heurter le mur d'une villa située du côté de la route
. Perdant son sang-froid, le chauffeur, en présence du danger couru, s'était précipité sur la chaussée. Sous la violence du choc, M. Blaisot, assis à l'intérieur, fut projeté en avant et blessé à la figure. En même temps, le col du fémur gauche était fracturé. Cette dernière blessure nécessita un traitement long et douloureux.
Une enquête fut ouverte pour établir les responsabilités et l'affaire est venue hier devant le tribunal correctionnel.
Le tribunal a condamné le chauffeur Gosselin à 100 francs d'amende; Biot également à 100 francs; MM. Ruault et Chapel sont déclarés civilement responsables.
Une provision de 15.000 francs est accordée à M. Blaisot sur les dommages et intérêts, dont le montant sera déterminé après expertise médicale.                  

 

Mai 1924  -  Vous pourrez observer le 8 mai prochain le passage de Mercure sur le soleil.  -  Le 8 mai prochain, les amateurs d'astronomie pourront jouir d'un spectacle aussi rare qu'intéressant. Mercure passera devant le Soleil et se projettera sur son disque brillant comme une tache ronde se dépavant d'un mouvement assez rapide. Malheureusement, le passage de la planète devant le Soleil commencera dans la nuit du 7 au 8 et le phénomène sera assez avancé lorsque le Soleil se lèvera sur notre horizon, c'est-à-dire à 5 heures 21 minutes (heure d'été).
A ce moment, une bonne jumelle grossissant cinq ou six fois et munie d'un verre fumé, vous montrera sur le disque solaire, une petite tache très noire, ronde, située sur la droite, non loin du bord ouest du Soleil (exactement Ouest-Sud-Ouest du disque). Pour une lunette astronomique renversant les objets, chercher la tache noire en haut, sur la gauche.
A 6 heures 3
5 minutes 20 secondes, la planète touchera le bord intérieur du disque solaire, puis traversera ce bord et enfin le quittera définitivement à 6 heures 37 minutes 20 secondes, ayant parcouru à peu près un diamètre entier. Il faudra attendre jusqu'au 8 novembre 1927 pour voir se, renouveler ce phénomène qui reviendra ensuite le 10 mai 1937. Les derniers passages ont eu lieu le 14 novembre 1907 et le 7 novembre 1914. Leur étude à l'Observatoire de Bourges a donné de très importants résultats, d'où il a été possible, en particulier, de préciser davantage la masse de Mercure.  

 

Novembre 1924  -  Mouvement de la population dans le Calvados.  -  La statistique du mouvement de la population dressée chaque trimestre dans le partement du Calvados a donné jusqu'alors pour l'année en cours, les résultats suivants : Année 1924, 1er trimestre, 674 mariages ; 2165 naissances, 2.420 ; décès. 2e trimestre, 805 mariages ; 2.013 naissances ; 1.936 décès. 3e  trimestre, 856 mariages ; 2.163 naissances ; 1503 décès.

On enregistre pour le trimestre qui vient de s'écouler un excédent de 660 naissances sur les décès en comparant ces résultats à ceux du trimestre correspondant de l'année 1923 (mariages 872, naissances 2194, décès 1.735, excédent des naissances sur les décès 459) on remarque que le nombre des naissances est sensiblement égal, et que celui des décès est en décroissance sur les chiffres de l’année précédente.

 

Décembre 1924  -  Terrible tempête sur les côtes de la Manche et de l'Océan.  -  Une tempête violente s'est élevée dans la nuit de vendredi et la journée de samedi.

Le poste de T.S.F. des Rouges-Terres a reçu plusieurs S.O.S., l'un émanant du navire anglais " Dallington ", qui se trouvait à 20 milles dans le sud-sud-ouest de l'ile Sainte-Catherine, dans une situation critique, en raison de la perte de son gouvernail.

Un autre s.o.s. a été enregistré dans la nuit de vendredi. Il provenait d'un vapeur anglais en détresse dans l'Atlantique, navire dont on n'a pu saisir le nom.

Le trois-Mats « Antiope » qui relâchait en rade de Cherbourg a chassé sur ses ancres et est parti à la dérive. Le navire, se trouvant dans une situation critique, fit des signaux de détresse. Le remorqueur « Zébu » fut envoyé à son secours. Par un heureux hasard, l’« Antiope » eut ses ancres accrochées à nouveau dans les chaînes servant, à amarrer. Sa nouvelle position étant excellente, le trois-mâts fut laissé il était.

On signale de nombreux dégâts en ville et dans les environs, mais jusqu'ici pas d'accident de personne.

 

Janvier 1925  -  Une nouvelle tempête.  -  Une bourrasque du Sud-Ouest est déchaînée. La vitesse du vent atteint son maximum. De gros paquets de mer balayent la grève. Toute navigation tière est suspendue. Des steamers sont rentrés au port se mettre à l'abri.
Le service sur Le Havre, Honfleur, Trouville, a été supprimé.

 

Mars 1925  -  La tempête continue. -  La tempête reprend avec une violence nouvelle sous l'action du vent du Nord, qui est justement redouté sur nos côtes normandes.

 

Avril 1925  -  Une centenaire aux noces d’or de ses enfants, à Caen.  -  On n'assiste pas deux fois dans la vie à un événement comme celui qui s'est déroulé hier à Langrune-sur-Mer, coquette station balnéaire située à 16 kilomètres de Caen, événement si exceptionnel que malgré la gravité d'une crise politique au dénouement difficile, M. Henry Chéron n'a pu résister au plaisir d'en être témoin. Et quel discours spirituel l'éminent orateur a prononcé à l'occasion de ces Pâques normandes. Oh ! la majorité parlementaire aurait tort de prendre ombrage de la présence de notre illustre concitoyen à cette magnifique manifestation, car dans la circonstance, il ne s'agissait ni d'inflation, ni d'assainissement financier.

Ce mardi 14 avril, les habitants de Langrune avaient décidé de fêter très solennellement les noces d'or de deux de leurs compatriotes. Vous le voyez rien qui concerne de près ni de loin les gens du Cartel, d'abord parce que ces Messieurs ne sont pas à la noce depuis quelques jours, ensuite parce qu'il serait plus que téméraire de parler de noces d'or dans l'état sont nos finances sous leur brillante dictature.

Un fait particulièrement rare donnait un caractère unique à la touchante cérémonie qui vient d'avoir lieu c'est que les époux, très aimés qui célébraient le cinquantenaire de leur union par une belle journée d'avril, en face d'une mer calme et reposée, comme le fut tout leur existence, étaient accompagnés à l'autel par une maman vénérable, objet des sympathies empressées de toute une population.

Mme Leseigneur, qui avait tenu à prendre part aux fêtes jubilaires organisées en l'honneur de ses enfants, est née à Caen 4 juillet 1823. Retenez bien ce millésime, il n'y a pas de coquille typographique, je dis le 4 juillet sous le règne de Louis XVIII, petit-fils de Louis XV et frère aîné de Louis XVI : 102 ans à peu près révolus.

Les parents de l'auguste centenaire connurent la célèbre héroïne caennaise, Charlotte Corday et assistèrent à la plupart des épisodes tragiques que provoqua dans notre ville la tourmente révolutionnaire. Malgré son grand age les facultés intellectuelles de Mme Leseigueur sont demeurées intactes. La parole est nette et la voix a conservé ses inflexions naturelles.

Il faut l'entendre évoquer les principales étapes de sa longue carrière, citer les dates avec une exactitude rarement en défaut. Si parfois un nom échappa à sa mémoire prodigieuse, il est vite rattrapé. Et quel charme de revivre dans ses récits, l'association des idées dénote une lucidité parfaite, l'histoire du bon vieux temps le passé de cette cité natale s'est écoulée toute son existence à l'ombre du clocher Saint-Pierre !

C'est entourée de ses petits-enfants et arrière petits-enfants qu'elle s'est rendue hier, aux noces d'or de son fils, M. Leseigneur, âgé de 78 ans, ancien percepteur à Brest, et conseiller municipal de Langrune. Quatre nérations étaient là, groupées devant le chœur de la vieille église du 13e siècle, si remarquable par son architecture et sa vieille tour centrale. L'imposante cérémonie, présidée par Mgr Lemonnier, évêque de Bayeux, commença à 10 heures précises. Le Conseil municipal et le clergé de la paroisse, attendaient à quelques pas de l'église, l'arrivée de l'auto, qui devait emmener à Caen, la centenaire.

Lorsque le véhicule apparut et descendit lentement vers la place, ce furent des acclamations répétées dans la nombreuse assistance qui se pressait pour mieux voir l'aïeule vénérée. Mme Leseigneur descendit de l'auto, soutenue par son fils. Elle écouta avec une émotion mal contenue les souhaits de bienvenue du maire de Langrune, et un compliment délicat formulé par un groupe d'enfants de l'école. Puis le cortège s'ébranla, précédé par les pompiers, la société de gymnastique avec ses tambours et ses trompettes, la section des anciens combattants avec leur drapeau. L'église avait peine à contenir la foule.

La messe fut célébrée par M. le curé de Langrune. Pendant l'office, un programme musical des mieux choisis fut exécuté par Mlle Costy, professeur de violon et piano, à Caen, notre distinguée collaboratrice, dont on connaît la virtuosité, joua un Andante de R. Eustache, un compositeur caennais fort apprécié, et le Prélude du Déluge, de St-Saens. Ces deux oeuvres furent interprétées avec une expression saisissante par la jeune artiste. M. Domin, l'organiste si distingué de Saint-Jean, accompagnait avec sa maîtrise habituelle; Mlle Leroy chanta avec beaucoup de sentiment, un Panis Angelicus, de Paul Fauchey et un Ave Maria, de Chérubini.

Au cours de la cérémonie, Mgr Lemonnier prononça une allocution très touchante. Après avoir félicité les époux cinquantenaires, il rappela le souvenir du fils de M. Leseigneur mort au front, et salua en termes émus l'heureuse centenaire qui partageait le bonheur de ses enfants, dans cette cérémonie mémorable.

Au moment ou le prélat terminait son discours, M. Chéron apparut. Il vint prendre place au côtés des héros de cette fête familiale, auxquels il avait tenu à apporter ses hommages. C'est au bras de l'ancien ministre de l’Agriculture que la centenaire redescendit la nef, saluant d'un sourire tous ceux qui se trouvaient sur son passage.

Comme on lui demandait si elle était fatiguée.

 - Non, répondit-elle gaiement, le Bon Dieu m'a donné toutes les forces nécessaires pour aujourd'hui, et je suis bien contente.

A la sortie de l'église, on se rendit au pied du monument aux morts situé à l'extrémité du cimetière. M. Leseigneur déposé sur le piédestal les gerbes qui avaient été offertes à l'occasion de ses noces d'or.

Quelques instants après, un banquet eut lieu à l'Hôtel du Petit Paradis, A l'heure des toasts le maire de Langrune félicita les époux Leseigneur et leur remit au nom de ses collègues deux objets d'art en souvenir de cette belle journée.

M. Leseigneur, très ému, remercia ses collègues de leur délicate attention.

M. Doucin, conseiller général de la Seine, propriétaire à Langrune, lut des vers charmants qui furent chaleureusement applaudis.

Et, M. Henri Chéron, qui présidait avec Mgr Lemonnier et la centenaire, prononça un de ces toasts pleins de bonhomie et d'humour il remporte toujours le plus vif succès.
Ajoutons que chacun apprécia le menu somptueux préparé par les propriétaires de l'hôtel.

 

Mai 1925  -  On retrouve dans l'Orne le cadavre d'un commis épicier disparu.  -  M. Georges Gillot, 31 ans, commis épicier au service de M. Picard à Langrune, s'était rendu le dimanche 10 mai à bicyclette à la foire de Caen. Depuis cette date, personne ne l'avait revu dans le pays. M. Picard qui avait la plus grande estime pour son employé, fit procéder à des recherches restées infructueuses. On découvrit cependant dans un restaurant voisin du Calvaire Saint-Pierre, la bicyclette du disparu et l'on apprit que le commis épicier avait déposé sa machine dans cet établissement au début de l'après-midi en précisant, qu'il la reprendrait dans la soirée. Ce même jour Gillot fut rencontré par des compatriotes vers 21 heures, affaissé au pied d'un arbre. Il paraissait pris de boisson. Or le cadavre du malheureux a été retiré de l'Orne, hier vers 15 h. 30, non loin du bac de la rue Montaigne.

Dans ses vêtements on a trouvé une montre et sa chaîne et une somme de 0 fr. 50, ainsi que différents papiers qui permirent de l'identifier aussitôt. Le corps ne portait aucune trace de violences. Une enquête est ouverte par la police à l'effet d'établir les circonstances exactes de cette mort mystérieuse.

Gillot était parti de Caen en emportant une somme de 350 francs.  Ses dépenses furent minimes à la foire. Dans quelles condition le commis épicier est-il tombé dans l'Orne ? Accident, suicide ? Gillot ne fut-il pas victime d'un agresseur qui aurait profité de son état d'ébriété pour le dévaliser et le précipiter ensuite dans la rivière ?

 

Mai 1925  -  Une tempête sur la côte normande.  -  Une tempête glaciale du Nord-Ouest, avec grains de pluie et grêle, sévit depuis hier, toutes les communications par mer avec Trouville sont interrompues; de nombreux bateaux de pêche ont relâcher. 

 

Juillet 1925  -  Mort d'une centenaire à Caen.  -  Mme Leseigneur, dont la population caennaise a fêté le centenaire il y a deux ans, est décédée la nuit dernière à Langrune, chez son fils, le sympathique conseiller municipal de cette commune.
On se souvient que le 14 avril dernier, Mme Leseigneur avait présidé la magnifique cérémonie des noces d'or de celui-ci et qu'elle eut alors la joie de voir réunies auprès d'elle trois générations.

Peu de temps après, la centenaire allait habiter définitivement à Langrune. Elle venait d'entrer dans sa 103e année.

Un service sera célébré à Langrune vendredi matin et l'inhumation aura lieu à Caen à l'ancien cimetière Saint-Pierre, dans un caveau de famille.
Nous adressons à M. et Mme Leseigneur, à leurs enfants et à la famille l'expression de nos sincères condoléances.

 

Août 1925  -  La tempête sur nos côtes.  -  Une très violente tempête soufflant de Sud-Ouest, s'est abattue sur le littoral. Une pluie diluvienne ne cesse de tomber. Par suite de ce mauvais temps, on craint que les nombreux bancs de poissons qui, cette année, se trouvent prés des côtes ne quittent les parages et disparaissent. Jusqu'à présent on ne signale aucun sinistre en mer.

 

Septembre 1925  -  le Syndicat d'Initiative de Littoral se transforme en Union des Syndicats d'Initiative de la côte Bleue, entre Orne et Vire. Bleu nacré, sans doute : tous les membres du bureau sont de la côte de Nacre.

 

Novembre 1925  -  Mercredi 18, mise en service de la 1er automotrice ou autorail sur la ligne Caen - Courseulles.

 

Décembre 1925  -  La défense de nos côtes contre les ravages de la mer.  -  Aujourd'hui, 4 décembre s'est ouvert à la mairie du 6e arrondissement, un congrès national pour la défense des côtes de France contre les ravages de la mer. 

On sait que, parmi les départements les plus éprouvés se trouvent la Seine-Inférieure, dont 20 communes sont menacées, le Calvados qui en compte 22, la Vendée, 9, dont celle de Noirmoutier, la Loire-Inférieure, 8 , les Basse-Pyrénées, 6.

Les sanatorial de la ville de Paris à Berck et dans la Somme sont en danger.

Les efforts individuels, ceux des municipalités et des départements ne peuvent suffire à la protection des territoires marins. Le budget des travaux publics est également insuffisant.

C'est pour remédier à cette situation que les représentants au Parlement de ces régions, les Syndicats de propriétaires et des riverains se sont associés et ont organisé ce congrès.

Quatorze département étaient représentés ceux qui bordent le littoral, des côtes espagnoles à la mer du Nord.

Sur l'Initiative de M. Thoumyre, le congrès a décidé la création d'un groupe parlementaire à la Chambre des Députées, groupe qui fonctionne déjà au Sénat sous la dénomination de groupe de la Défense maritime et qui présentera au Parlement la défense des décisions prises par les intéressés en vue de se défendre contre la menace de la mer. Le groupe sénatorial se verra prochainement adjoindre de nouveaux éléments.

Une des premières initiatives de ce groupe sera de demander à la Chambre des Députés de voter sur un projet de loi qui sera déposé en vue de relever les crédits attribuées à la fense des cotes, c'est-à-dire, d'attribuer une somme de 70.000 francs dans ce but au budget des Ponts-et-Chaussées.

Le groupe de Défense maritime demandera également le vote d'une loi spéciale pour qu'un contingent soit prélevé sur le produit des impôts et taxes sur les jeux et casinos en faveur des plages menacées. M. Babin, inspecteur général des Ponts-et-Chaussées et des phares et balises, et président du Conseil supérieur des Ponts-et-Chaussées, représentait les administrations intéressées.

LANGRUNE-sur-MER (Calvados) -  Entrée du Pays, route de la Délivrande

4   -   Langrune-sur-Mer (Calvados) -  Villas Beau Soleil, La Terrasse et Castel Belle-Vue

La Cigale et la Fourmi

9   -   Langrune-sur-Mer (Calvados) -  Sur la Plage  -  Effets de Vagues à marée montante

6   -   Langrune-sur-Mer (Calvados) -  La Plage à Marée montante

 

 

LANGRUNE-SUR-MER (Calvados)   -  Vue générale de la Plage  
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